Sujet: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Mer 30 Jan - 19:23
Invité Invité
Sujet: Qu'on me fou la paix... Jeu 31 Jan - 2:17
________________________________________________
Chapitre 1 Qu’on me fiche la paix...
◆ ◆ ◆
C’était la dernière journée avant sa permission et c’était plus qu’apprécié.. Au palais, on s’occupait des nouvelles recrues qui ne faisaient que gaffer ou rire entre eux alors qu’il fallait s’entraîner. Combien de fois avait-il fallu les ramener à l’ordre ? Elles étaient déjà trop nombreuses et la patience du Lieutenant avait atteint sa limite. Un frère d’armes avait dût le calmer avant que celui-ci n'aille leur fouttre une raclée derrière la tête pour les ramener à l’ordre. Le prenant à part, le soldat leva les yeux vers Kaëran qui ruminait intérieurement. Il lui parla, mais son supérieur et ami semblait ailleurs.
‘‘ Kaë... ? Hey ! ‘‘
Kaëran détourna enfin le regard pour le poser sur son frère d’armes qui fronçait légèrement les sourcils. Celui-ci était inquiet et ne savait pour quelle raison.
‘‘ Quoi ? ‘‘
‘‘ Tu as les nerfs à vif depuis quelque temps. Je sais que l’état de ta mère s’aggrave, mais ce n’est pas une raison pour s’acharner sur les jeunes même s’ils sont aussi maladroits que des jeunes moutons. Peut-être devrais-tu songer à prendre quelques jours de repos pour t’occuper d’elle ? ‘‘
‘‘ C’est inutile, Eiriel s’occupe déjà d’elle quand je ne suis pas là ... ‘‘
‘‘ Mais si tu étais à la maison, ce sera toi qui le ferais et pas elle. De plus, je suis certain que ta mère appréciera de te savoir à ses côtés au lieu de passer tes journées à ruminer et tes soirées à fricoter dans les tavernes de la cité. ‘‘
Le Lieutenant lui lança un regard qui voulait dire mêle toi de ce qui te regarde et le poussa sans le brusquer pour retourner à ses occupations. Son frère d’armes ne put que soupirer de découragement et s’en retourna dans les rangs pour veiller, comme tous les plus anciens, sur l’apprentissage des plus jeunes et des recrus. Après cet entraînement matinal, Kaëran prit machinalement le chemin qui conduisait à l’aile réservée aux soldats pour assister à une réunion qui ne faisait que résumer la situation en ville ainsi qu’à l’extérieur; aucune menace en vue. Bien ! Alors, il pouvait s’ennuyer à remplir sa paperasse dans un bureau, retrouvant enfin le calme et le silence. Se retrouvant seul avec lui-même et ses pensées. Quelle journée ennuyante quand même ... s’en devenait ridicule, mais au moins elle se termina. Kaëran quitta donc le palais pour se rendre jusqu’au village sans prendre la peine de s’en aller chez lui. À quoi bon ? Eiriel y était certainement et il n’avait pas envie de se faire engueuler comme elle savait si bien le faire ‘‘ Ce n’est que pour ton bien et celui de ta mère ! ‘‘ Criait-elle à chaque fois. Mais il s’en fichait. Au point où il en était rendu ... Sa gorge se serrait en pensant que Naël ne survivrait pas bien longtemps encore. Sa mâchoire se crispa elle aussi. Secouant ses idées, le jeune homme emprunta un chemin qu’il connaissait bien pour y être passé régulièrement: celui de la taverne. Dès que la porte s’ouvrit, les yeux se levèrent et le calme se fit. Le tavernier était à chaque fois soulagé de le voir débarquer. Non seulement parce que sa seule présence ramenait l'ordre dans l’établissement, mais aussi parce qu’il était un bon client et qu’il laissait trois fois trop de pourboire. Qui s’en priverait ? Pas lui en tout cas.
Kaëran s’asseya donc au même endroit qu’à l’habitude; une chaise et une petite table pour deux personnes située à l'extrême droite de la taverne, dans un coin plutôt sombre. Ici, il était certain d’avoir la paix pendant la soirée et pourrait se morfondre. Mais son petit moment de solitude ne dura pas bien longtemps. Au bout d’une heure, où le jeune homme avait déjà avalé une bonne quantité d’alcool, un étranger vint prendre la place vacante juste devant lui sans même demander la permission. M’enfin ..., c’était à peine s’il l’avait remarqué alors bon.
‘‘ C’est ma tournée. ‘‘
Une chope bien remplie apparue alors devant celle qu’il tenait déjà d’une main ferme. C’est alors que les yeux vairons de Kaëran se levèrent vers cet inconnu qui souriait. Boff ... qu’est-ce qu’il pouvait s’en foutre après tout. Si cet homme voulait parler, qu’il parle, mais hors de question qu’il en fasse de même. Alors, le Lieutenant engloutit le restant de bière qu’il y avait dans son contenant et ne se pria pas pour prendre la bière qu’on lui avait offerte. Le liquide froid coullait alors dans sa gorge, brouillant son esprit au fur et à mesure que l’étranger parlait. Il déblatérait sans arrêt et les sujets lui échappèrent complètement. À vrai dire, il était seulement parti dans un autre monde où sa frustration s’apaisait et se cachait pour un temps déterminé. Dans un endroit où il pouvait enfin respirer librement. Dans un endroit à la douleur ne le rongeait pas à petit feu.
Puis deux heures plus tard ... Arh ... mais ce qu’il commençait à être énervant celui-là ! Allait-il finir par le laisser tranquille un jour ? Il semblerait que non, car maintenant l’homme parlait de sa fille. Il n’en avait rien à foutre de sa fille ! Tout ce qu’il voulait, c’était la paix et rien de plus. Sauf qu’elle semblait bien difficile à trouver en cette journée merdique. Jusque-là, Kaëran regardait la poignée de sa chope vide et ne déviait aucunement jusqu’à ce moment. Leurs regards se croisèrent et l’étranger esquissa un étrange sourire tout en se levant de sa chaise.
‘‘ Venez demain à la boutique de tailleur sur la grand-rue. Vous ne serez pas déçu de me l’acheter. ‘‘
D’acheter quoi ? Un vêtement ? Alors là, il en avait manqué un bout, car il ne se souvenait même plus de quoi il en détournait. Demain il saurait certainement ...
Sur ce, le Lieutenant quitta les lieux d’un pas extrêmement lent et s’en retourna à la maison. Le chemin lui semblait long tout à coup et le décor semblait sans cesse s’éloigner. Bon sang ... il avait un peu trop abusé des bienfaits de l’alcool et l’engueulade à laquelle il aurait droit en mettant un pied chez sa mère !
‘‘ KAËRAN EIRA ! ‘‘
Voilà, ça commençait déjà ... Eiriel le prit par l’encolure de sa cape vermeille et le cloua brusquement contre la porte refermée. Le métal de l’armure ne manqua pas de se plaindre dans un tintement métallique alors que le regard de la femme se plantait dans le sien. Kaëran roula les yeux et soupira, tentant de se dégager comme à l’accoutumé, mais cette fois Eiriel ne se laissa pas faire et lui empoigna le visage pour le serrer fortement d’une main.
‘‘ Oh là jeune homme ! Tu vas m’écouter cette fois parce que je commence à en avoir marre ! ‘‘ S’écria-t-elle, rouge de colère. ‘‘ Ta mère a besoin de toi en ce moment et toi tu vas noyer ta peine parmi les soulons?! Tu es un Lieutenant, Kaë ! Montre l’exemple bon sang ! ‘‘
‘‘ Qu’est-ce que ça peut te faire que je sois sobre ou pas ? Fiche-moi la paix... ‘‘
‘‘ Ce que ça peut me faire ?! Tu es comme un fils pour moi et ta mère se meurt Kaëran... Va la voir. Je t’en prie ... ‘‘
Le concerné fut libéré de l’emprise de la femme de forte corpulence qui le regardait maintenant, une profonde tristesse peinte au fond de ses yeux verdâtres. Sans un mot Kaëran alla se débarrasser de son armure et alla dans la chambre de sa mère où se trouvait déjà Eiriel. Naël était semi-assise, plusieurs oreillers sous le dos afin de lui assurer un support confortable. Son regard bleuté se posa alors sur son fils qui vint prendre place à ses côtés, s’asseya simplement sur le bord du lit. Une main frêle et froide caressa sa chevelure en bataille et de faibles paroles sortirent de la bouche de la mère.
‘‘ Kaë... je suis désolée... je suis devenue un fardeau n’est-ce pas ? ‘‘
‘‘ Non, ne dis pas de stupidités, je t’en prie. Tu te trompes ... ‘‘
‘‘ Tu ne souris plus. Tu ne ris plus. Tu ne me racontes plus de blague avant que je m’endorme et... je ne te vois plus aussi régulièrement qu’auparavant... ‘‘ Mumura t-elle avec difficulté. ‘‘ Eiriel m’a tout dit... et tu sens l’alcool à plein nez... Alors ne me cache pas la vérité, mon grand. ‘‘
Kaëran planta son regard dans celui de sa mère et ne put se résoudre à le soutenir plus longtemps. Ce sentiment de honte revenait à la surface, tout comme la pensée de savoir que bientôt, elle le quitterait, qu’elle l’abandonnerait pour de bon et lui qui buvait comme un lâche... quel égoïste !
Le jeune homme ne chercha pas à se justifier et se leva, couchant confortablement sa mère dans son lit. En tirant les couvertures sur elle, ses lèvres se déposèrent sur son front et il ferma les yeux en fronçant les sourcils.
‘‘ Je t’aime ... m'man ... ‘‘
‘‘ Mon chéri ... ‘‘ Rétorqua t-elle, sentant la frustration de son fils.
Eiriel se poussa pour le laisser sortir de la chambre et elle envoya un regard désolé à Naël qui ferma les yeux de tristesse. Voir son enfant dans un tel état à cause de sa maladie lui faisait si mal. Mais que pouvait-elle y faire ? La mort ne venait toujours pas la chercher et pourtant elle souhaitant tant retrouver son amour, son soldat qui était quelque part, elle ne savait où. Une larme roula sur sa joue pâle alors que la porte se refermait derrière son amie qui quitta la demeure pour s’en retourner chez elle. Dans la pièce voisine, Kaëran se maudissait de ne pas avoir su réconforter sa mère. Il n’y arrivait pas et ne savait pas comment faire... Ainsi, il se laissa tomber sur le dos dans son lit et ferma les yeux à son tour, se morigénant en silence.
Au petit matin, il se leva avec difficulté; la gueule de bois. En grognant et se frottant la nuque de la main droite, notre soldat fila se laver dans la pièce d’eau et profita de la chaleur de l’eau pour détendre ses muscles endoloris et marqués par une semaine chargée. Lorsqu’il ressortit, il enfila un pantalon propre et quitta la pièce, une chemise en main, puis bifurqua dans la chambre de sa mère qui était réveillée, mais qui fixait le plafond.
‘‘ Bon matin, m'man. ‘‘ Dit-il, doucement.
‘‘ Bon matin mon grand ‘‘ Répondit t-elle en tournant la tête de côté pour l’apercevoir.
Celui-ci l’aida à s’assoir dans son lit et elle caressa sa joue, la mine dépitée. Son fils prit alors sa main dans les siennes, l’éloignant par le fait même de son visage et la garda emprisonner. Kaë baissa le regard, ferma les yeux un moment et soupira. En réalité, il cherchait ses mots. Il cherchait quoi lui dire alors que pourtant, ce n’était pas si difficile !
‘‘ J’ai à faire en ville, mais je vais vite revenir et passerai la journée avec toi. ‘‘
‘‘ Tu ... pourrais m’amener à la rivière ? J’aimerais voir cet endroit encore une fois et ... prendre un peu d’air frais. Pas que je n’aime pas mon lit, mais ... ‘‘ Elle se tut brusquement, secouée d’une violente toux puis poursuivie après s’être calmée. ‘‘ Je suis las de voir le même décor tous les jours. ‘‘
Naël souriait à son fils qui ne le lui rendait toujours pas, se contentant d’embrasser son front avant de la laisser aux bons soins d’Eiriel qui venait d'arriver à la maison pour la mettre au bain. Kaëran salua alors les deux femmes puis fila vers la grand-rue en direction de la boutique du tailleur tout en roulant les manches de sa chemise jusqu’aux coudes. Sa mémoire lui jouait des tours et il ne parvenait toujours pas à savoir ce que l’homme de la veille lui voulait. Ce ne fut qu’en débarquant sur place, après plusieurs minutes de marche, qu’il sut de quoi il en retournait.
‘‘ Vous voilà ! J’ai bien cru que vous auriez oublié, même si la matinée ne fait que commencer. Vous êtes donc venu la chercher, n’est-ce pas ? ‘‘
‘‘ La chercher ? ‘‘ Dit-il brusquement.
Le tailleur fronça les sourcils un instant, faisant douter son invité, mais s’empressa de rire et de contourner son comptoir pour s’approcher de lui. Entourant les épaules du soldat d’un bras, Monsieur Stark commença.
‘‘ Ma fille, vous ne vous souvenez pas ? Vous étiez sensé me l’acheter. ‘‘
Le Lieutenant parut outré et se dégagea brusquement de cet homme qui lui semblait un peu trop amical soudainement. Et puis, de quoi parlait-il ? Acheter sa fille ?! Mais il divaguait ou quoi? Il était peut-être désespéré et en train de couler, mais de là à acheter une femme, jamais.
‘‘ Écoutez, je ne sais pas ce que vous avez cru, mais il est hors de question que j’achète votre fille. Si c’est d’argent que vous avez besoin, prenez ma bourse et fichez-moi la paix. ‘‘ Dit-il en lui lança ladite bourse d’or.
‘‘ Mais attendez ! J’ai su que votre mère était mourante ... un peu d’aide et de compagnie ne lui ferait certainement pas de tort non ? Son amie pourrait donc se reposer. ‘‘ Commença t-il avant d’hurler : ‘‘ ELLANA ! ‘‘
Kaëran n’eut même pas le temps de rétorquer qu’il entendit du bruit et qu’une jeune femme apparut en sortant de l’arrière-boutique, un sac en main. De taille moyenne, elle avait de longs cheveux noirs qui cascadaient légèrement jusqu’à ses reins. Cependant, il ne put voir clairement son visage, car elle avait aussitôt baissé la tête en présence des deux hommes. Le père de la jeune femme souriait et la poussa doucement dans sa direction. C'était comme s'il cherchait à s'en débarrasser.
Forcé à quitter la boutique, Kaë n’eut le temps que de se retourner pour désapprouver tout ça que la porte se referma devant son nez. Non, mais il avait du culot ! Maintenant il se retrouvait avec une inconnue qui ne semblait jamais avoir mis le pied dehors! Les membres de la dénommée Ellana tremblaient sans qu’il en comprenne la raison, mais il ouvrit la marche et automatiquement la jeune femme le suivit en silence. Ce fut ainsi jusqu’à ce qu’ils arrivent chez lui, croisant Eiriel qui s’apprêtait à partir.
‘‘ Ta mère t’attend avec impatience, Kaë. ‘‘ Puis elle étira le cou. ‘‘ Oh ! Il y avait longtemps que tu n’avais pas ramené une jolie demoiselle. Comment t’appelles-tu ma belle ? ‘‘
________________________________________________
Dernière édition par Kaëran Eira le Ven 3 Mai - 3:22, édité 5 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Jeu 31 Jan - 19:12
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Ven 1 Fév - 2:43
________________________________________________
Chapitre 1 Qu'est-ce que... ?
◆ ◆ ◆
Eiriel avait légèrement arqué un sourcil en voyant la réaction pour le moins anormale de la jeune femme. Levant un regard interrogateur en direction de Kaëran, celui-ci planta son regard dans le sien et haussa les épaules d’incompréhension. Tout comme pour elle, la cause de la nervosité d’Ellana lui restait inconnue. Jamais elle n’avait levé les yeux du sol, cachant ainsi son visage dans l’ombre de sa longue et épaisse crinière ténébreuse. Peut-être y avait-il une raison qui pouvait expliquer cette peur ? Et puis d’un autre côté, ce n’était pas tous les jours qu’un père vendait sa fille à un parfait inconnu. La peur qu’il lui fasse du mal devait la tenailler jusqu’au plus profond de ses entrailles. D’ailleurs, le jeune homme ne devait pas omettre de lui dire de partir, si là était son réel désir. Il n’allait tout de même pas la forcer à rester si elle ne le voulait pas.
‘‘ Ellana, Madame Eira. ‘‘ Répondit l’invitée d’une voix faible et tremblante.
Pour détendre l’atmosphère et surtout apaisé l’état d’anxiété d’Ellana, Eiriel se mit à rire doucement. Si l'invitée avait daigné lever les yeux une seule petite seconde pour la regarder, là elle aurait compris qu’il n’y avait aucune ressemblance entre elle et les Eira. Eiriel était une femme assez corpulente et de petite taille. Ses cheveux étaient mi-longs, noirs et toujours attachés en chignon. Son regard lui, était aussi sombre que sa chevelure alors que sa peau était plutôt sombre. Se voulant rassurante, l’amie de Naël dit d’une voix douce :
‘‘ Je ne suis pas Madame Eira, Ellana. Moi je suis une amie, je me nomme Eiriel. ‘‘
Mais l’absence de réaction étonna Kaëran tout comme Eiriel. Qu’est-ce qui n’allait pas ? Ses tremblements avaient repris de plus belle et même, c’étaient amplifié légèrement. Les deux adultes s’échangèrent un long regard, confus, mais l’amie de Naël devait quitter. Elle avait tout de même un foyer elle aussi ! Sur ce, elle enlaça Kaëran qui fit de même et la salua tout en refermant la porte derrière elle. Ellana n’avait pas bougé d’un poil, toujours au même endroit, la tête basse. Elle allait finir par avoir un torticolis à force de rester dans cette position. M’enfin... si elle était bien dans cette posture ! Kaë ne jeta donc qu’un bref regard à la jeune femme et commença à marcher dans le hall, puis entra dans la chambre de sa mère qui frétillait d’impatience. Elle était allongée, certes, mais ses pieds ne cessaient de bouger.
‘‘ Te voilà enfin ! ‘‘
‘‘ Enfin ? Je ne suis pas parti depuis bien longtemps pourtant ... Ce que tu es impatiente. ‘‘
Naël ricanait doucement, mettant une main devant sa bouche lorsqu’elle se mit à toussoter, puis fit un sourire radieux à son fils qui l’aidait à s’assoir de moitié. C’est alors que son ventre se mit à crier famine, attirant le regard de Kaëran qui fronçait les sourcils.
‘‘ Tu ne viens pas de manger ? ‘‘
‘‘ Je voulais t’attendre... comme tu n’avais pas mangé toi non plus, j’ai cru que ce serait bien de le faire près de la rivière. ‘‘ Avoua t’elle en souriant bêtement.
‘‘ Je vais réprimander Eiriel dès demain. ‘‘ Répondit Kaë, un sourire en coin à peine visible sur les lèvres.
Quittant alors la chambre pour se rendre à la cuisine, le jeune homme passa à côté d’Ellana. Habitué d’être seul dans cette maison avec sa mère, Kaëran en avait oublié la présence de la jeune femme tellement elle se faisait discrète et petite. Mais elle ne passa pas inaperçue aux yeux d’une autre personne. Naël avait vu sa silhouette en retrait en dehors de la pièce. Au départ, elle n’était pas certaine, croyant halluciner, mais elle ne se trompait pas. Il y avait bien une jeune femme qui lui était inconnue dans sa demeure. C’était donc elle qu’elle avait entendue un peu plus tôt !
‘‘ Entre donc…n’aie pas peur… ‘‘ Murmura doucement la mère alors que la jeune inconnue s’approchait tranquillement, la tête basse. ‘‘ Ellana…c’est…ça ? ‘‘
‘‘ Mon fils a bien besoin d’une compagnie autre…que celle d’une mère malade… ‘‘
Un sourire triste se dessina sur les lèvres de Naël qui baissa légèrement les yeux. Elle aurait tout donné pour avoir une santé de fer et de pouvoir prendre soin de son seul enfant comme le faisait les autres parents. Certes son fils était devenu un adulte, un homme et avait une profession pour le moins gratifiante, mais une mère ne devait-elle pas veiller longtemps sur sa progéniture ? Ce qui la désolait le plus dans tout ça était qu’elle ne pourrait pas connaître la femme qui partagerait sa vie, son mariage et ne verrait jamais ses petits enfants si un jour il en avait. La gorge serrée, Naël ferma les yeux un moment puis chassa ces pensées pour reporter son attention sur Ellana, la regardant de ses yeux bleutés.
‘‘ Tu peux parler…tu sais…’’
Elle était bien silencieuse cette petite... pourtant, Naël n’allait pas la manger si elle voulait parler. Du moins, pas à sa connaissance !
‘‘ Kaë va te préparer une chambre… ‘‘ Commença t-elle, Ellana s’empressant alors de rétorquer :
‘‘ Monsieur Eira n’a pas besoin de me préparer une chambre, Monsieur Eira peut me donner un coin ou je peux dormir, Monsieur Eira ne doit pas me donner un lit. ‘‘
La mère en eut le souffle coupé. Monsieur Eira ? Personne ne l’appelait ainsi pourtant. Lui qui avait une sainte horreur des formules de politesse. S’il entendait ça, ses cheveux se dresseraient bien sur sa tête le pauvre ... C’est à ce moment qu’Ellana se remise à trembler, inquiétant Naël qui n’avait jamais vu une telle réaction. Elle avait peur ? Si oui, de quoi? De son fils ? Impossible ... il n’avait jamais levé la main sur qui que ce soit, même lors de ses crises de frustration. La seule chose qu’il faisait était de claquer les portes avec une telle force que les cadres de la demeure tombaient sur le sol dans un bruit sourd. Se voulant rassurante, la mère adoucit le timbre de sa voix et arqua les sourcils et demanda :
‘‘ Je n’ai pas peur…Madame Eira ne doit pas se soucier de moi. Je ne suis rien, il ne faut pas prêter attention à moi. ‘‘
Naël parut littéralement bouche bée. Cette jeune femme n’avait-elle aucune estime d’elle pour se traiter de la sorte ? Dès qu’elle en aurait l’occasion, il faudrait qu’elle en parle avec son fils, car c’était étrange. Cela expliquait aussi le fait qu’elle ne daigne leur jeter un seul regard. C'était certainement pour ne pas les offusquer. Kaëran passa alors devant la chambre, se dirigeant tout au fond du couloir où se trouvait la chambre d’ami qui n’avait pas été utilisée depuis longtemps. Prenant des draps qui se trouvaient dans le coffre situé au pied du lit, le jeune homme les secoua et les plaça vite fait bien fait avant de revenir vers sa mère et Ellana.
‘‘ Tout est prêt. La chambre d’ami aussi. Si tu veux aller porter ton sac à ta chambre, elle se situe au bout du couloir, Ellana. ‘‘
La concernée semblait hésiter, mais elle s’exécuta sans un mot et quitta la pièce alors que Kaëran s’approchait de sa mère qui s’asseyait avec difficulté au bord du lit.
‘‘ Kaë ... cette jeune femme, tu la connais ? ‘‘
Kaëran croisa alors le regard inquiet de sa mère. Bon sang ... Il s’était douté qu’ils auraient fini par en parler, mais là ? Maintenant ? Tout ça était dû à un malentendu à cause de la veille. Qu’allait dire sa mère s’il lui racontait ce dont il se souvenait de sa soirée à la taverne et qu’en réalité, le tailleur de Racium ne désirait que lui vendre sa fille pour une modique somme d’argent ? Modique pour lui oui ... Le Lieutenant soupira de découragement et répondit par la négative à sa mère qui semblait du coup rassurée. En fait, Naël avait eu peur qu’Ellana soit dans cet état à cause de son fils. C’était stupide de croire ça, mais ne sait-on jamais ! Or, elle faisait entièrement confiance à Kaë. Sur ce, le jeune homme l’aida à grimper sur son dos, barrant ses jambes d’un bras et tenant ses poignets de l’autre.
‘‘ Tu as encore maigri et pourtant, tu manges plus qu’avant. Je n’y comprends absolument rien ... ‘‘
‘‘ Ah ! Secret ... de femme malade ! ‘‘
‘‘ Mouais ... ‘‘
Ellana apparut à ce moment, et on lui demanda gentiment de prendre le panier qui se trouvait sur la table de cuisine, car personne d’autre qu’elle ne pouvait l’apporter. Encore une fois, elle s’exécuta et le prit. Naël lui demanda alors de les accompagner et Kaëran ne s’y opposa pas, car de toute manière, elle n’était pas totalement encombrante. Ainsi, le trio se dirigea vers la rivière qui se situait en bordure de Racium, quelque peu en dehors des murs de la ville, en pleine nature. Le Lieutenant ouvrait la marche, Naël surveillait Ellana, et Ellana suivait comme un chien de poche derrière dans un silence total. Une fois sur les lieux, la mère délia ses jambes et posa délicatement les pieds par terre. Son fils lui servit donc de support alors qu’elle essayait de marcher, mais ses forces l’abandonnaient et elle n’y arrivait plus...
‘‘ C’est désolant... je me sens tellement inutile. Mes jambes ne me supportent même plus... ‘‘
Naël fut prise d’une violente toux et grimaça sous la douleur, entourant sa gorge de ses doigts alors que Kaëran s’agenouillait devant elle, sa main sur son front.
‘‘ Tu recommences à faire de la fièvre ... tu es certaine de vouloir rester ici ? ‘‘
‘‘ Je ne veux pas ... retourner dans mon lit ! ‘‘
C’était aussi simple que ça et Kaëran ne chercha pas à s’obstiner avec sa mère qui était bien décidée à profiter de sa liberté. De plus, il était difficile pour elle de passer une journée bien remplie avec son propre enfant. Alors, autant en profiter pendant qu’il ne se défilait pas. Pour ça, elle se devait de remercier Eiriel qui l’avait une fois de plus remis à sa place. Bref, on s’installa tranquillement et Naël tapota la couverture sur laquelle elle était assise pour montrer à Ellana qu’elle pouvait s’assoir. Celle-ci s’exécuta docilement comme à toute les fois et on lui donna de quoi se rassasier.
L’après-midi se déroula dans un silence plutôt apaisant pour les Eira qui ne faisaient que profiter des sons de la nature ainsi que de ses douces odeurs. Il n’y avait rien de mieux pour se vider l’esprit et de fuir la vie de la ville au quotidien. Les yeux fermés, le nez dans les airs, Naël souriait doucement et profitait de la douce caresse du vent sur sa peau et ses cheveux alors que le Lieutenant faisait voler des pierres plates à la surface de l’eau, celles-ci rebondissants à quelques reprises avant de couler. Le temps s’écoula alors que le vent se levait toujours un peu plus. Plus fort. Plus violent. Le ciel commençait tout juste à se couvrit même si au loin on pouvait voir une épaisse masse grisâtre s’approcher dangereusement de Racium. Kaëran s’approcha alors de sa mère qui fit la moue, mais comprit lorsqu’il lui désigna l’horizon de la tête.
‘‘ Il ne faudrait pas que vous attrapiez froid toutes les deux ... ‘‘
Eh non... il n’avait pas envie d’avoir deux malades à s’occuper en plus de ses responsabilités au palais. Alors direction la maison et d’un pas un peu plus rapide. Le chemin de retour fut plus court puisque Kaë passait par les petites rues habituellement peu fréquentées et fréquentables à ces heures. Mais bon, on le connaissait tout de même maintenant et même un pur idiot n’oserait lui sauter dessus sans finir le nez cassé; on ne s’en prenait pas à sa mère. Voilà. Donc une fois à la maison, Naël fut conduite dans le salon alors que Kaëran sortait ce qui se trouvait dans le panier pour ensuite le ranger et comme bientôt ce serait l’heure du repas, il commençait à couper les légumes. Ellana se tenait là, à côté, et semblait attendre quelque chose qu’il ignorait. Ses yeux vairons se posèrent alors sur elle, mettant en arrêt temporaire ce qu’il faisait.
‘‘ Je n’ai pas besoin d’aide. Tu peux t’assoir avec ma mère et faire comme chez toi. ‘‘
Encore une fois, ce fut l’hésitation, mais elle alla rejoindre sa mère qui tentait de converser avec elle. Peut-être était-elle seulement d’une extrême timidité ?
Dans l’heure qui suivit, l’homme de la maison servit le repas et alla aider sa mère à se mettre à table. Tous deux regardèrent Ellana qui n’avait pas imité le mouvement et Naël fronça les sourcils. Sa main serra celle de son fils et la mère l’invita à les rejoindre à table. On commença donc à manger et le silence était omniprésent. Trop peut-être ?
‘‘ Tu t’améliores, Kaë ! Tu ne fais plus brûler la nourriture ‘‘
Le Lieutenant leva les yeux vers sa mère, surpris par un tel aveu alors qu’elle lui souriait, les yeux brillants. Confus, il lâcha ses ustensiles et toucha de nouveau son front alors qu’elle versait une larme.
‘‘ Je vais ... bien ... j’aimerais seulement que ... ce genre de moments soient plus réguliers ... ‘‘
Mais Kaëran garda le silence, essuyant la joue de sa mère qui termina son assiette avec difficulté. Après le repas, Naël fut envoyée au lit par son fils qui retourna à la cuisine lavée les couverts, perdu dans ses pensées. Jamais il n’avait fait attention à la présence d’Ellana qui le suivait comme son ombre. Essuyant ses mains, il sursauta en la voyant à quelques pas de lui et soupira profondément.
‘‘ Je croyais que tu étais allé dormir ... ‘‘ Commença t-il. ‘‘ Tu peux aller te laver si tu veux, la salle où se trouve la cuve est dans la maisonnée annexe à la demeure. Prends le couloir de droite. Il y a tout ce qu’il faut là dedans. ‘‘
Sauf qu’il dut lui montrer le chemin en prenant les devants, car elle ne bougea pas d’un poil. Cependant, ses tremblements avaient repris d’un seul coup, et ce, sans qu’il n’en comprenne une fois de plus la cause. C’était quelque peu déroutant quand même. Surtout qu’elle ... ne parlait pas ou très peu. Kaëran la laissa donc seule, refermant la porte derrière elle et s’en alla dans le salon pour éteindre le feu qui brûlait sous la cheminée. Maintenant, il était temps pour lui de se mettre au lit. Poussant les draps vers le pied du lit, le jeune homme replaça ses oreillers et alla tirer les rideaux tout en se débarrassant de sa chemise qu’il lança sur le fauteuil. Une main sur la nuque, la massant délicatement, Kaë sentit la fatigue le prendre de cour, mais il y avait quelque chose d’étrange ... Ses yeux vairons scrutèrent la pièce jusqu’à ce qu’une silhouette apparaisse dans l’embrasure de la porte et s’approche de lui d’un pas peu assuré. La lumière de la lune entrait à peine dans la pièce puisque les rideaux la bloquaient, mais c’était tout de même assez pour qu’il puisse voir que c’était Ellana ... dépouillée de tout vêtement. Son coeur rata un battement alors qu’elle réduisait la distance et enfin, elle se stoppa ne le regardant toujours pas. Et lui qui restait sur place comme un pur imbécile ! Mais c’était quoi ce cirque ? Qui lui avait dit de faire ça ? Pas qu’elle était laide et non désirable, mais quand même... il n’était pas ce genre d’homme. Aussi s’empressa-t-il de reprendre sa chemise qui traînait et de la lui mettre sur les épaules pour cacher ce corps de femme.
‘‘ Tu devrais ... aller dormir. ‘‘ Dit-il, quelque peu mal à l’aise. ‘‘ Va dans ta chambre ... et demain, si tu veux partir, tu le pourras. Tu n’es pas obligé de rester ici si tu n’en as pas envie. ‘‘
Il n’était pas dupe quand même. Elle ne faisait que trembler depuis son arrivée et jamais elle n’avait regardé quelqu’un dans les yeux. Jamais. Il ne savait même pas à quoi ressemblait son visage et n’avait pas non plus vu ses yeux ... c’était assez étrange. Et puis, se retrouver avec des inconnus ... la pauvre ...
Spoiler:
[HRP: J'ai encore pondu un pâté U.U. Ne plus jamais dire que ma réponse ne sera pas longue ! ]
________________________________________________
Dernière édition par Kaëran Eira le Sam 4 Mai - 6:23, édité 2 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Ven 1 Fév - 16:02
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Ven 1 Fév - 20:48
________________________________________________
Chapitre 1 Confusion
◆ ◆ ◆
La jeune femme resta plantée là, devant lui sans aucune réaction apparente. Peut-être que dans son esprit régnait une tempête ? Il ne pouvait le dire, car le regard d’Ellana lui restait toujours inaccessible. En ce qui le concernait, son esprit ne pouvait être plus confus qu’il le fût à cet instant. Ils ne se connaissaient pas, ne s’étaient aucunement regardé et n’avaient nullement échangé depuis qu’elle était parmi eux. Pourtant, elle semblait vouloir s’offrir à lui tout bonnement malgré sa peur. Était-ce son père qui lui avait ordonné de faire une telle chose ? Ses pensées furent coupées lorsqu’un murmure s’échappa de la bouche d’Ellana qui se départissait de la chemise que Kaëran lui avait mise sur le dos.
‘‘ Veuillez m’excuser Monsieur Eira, je ne voulais pas vous offenser Monsieur Eira. Je partirais selon votre bon vouloir Monsieur Eira. Pardonnez-moi… ‘‘
Kaëran fut surpris de ces propos et ne sut quoi rétorquer sur le coup. Selon ... son bon vouloir ? Pourtant, il venait de lui dire qu’elle pouvait partir de son plein gré si c’était ce qu’elle voulait ! Alors là, le Lieutenant n’y comprenait décidément plus rien. Une tonne de questions tournaient dans sa tête, mais Ellana lui avait tourné le dos et avait quitté la pièce en refermant la porte derrière elle. Ses pas étaient à peine perceptibles dans le couloir, mais il entendit bien la porte de la chambre d’ami se refermer. Une main sur la nuque, le jeune homme la massa une seconde fois et leva les yeux vers le ciel. Un long et profond soupir s’échappa de ses poumons alors qu’il cherchait des réponses à ses questions. Pourquoi Ellana agissait-elle ainsi ? Pourquoi avait-elle aussi peur et semblait-elle aussi ... soumise ? C’était à n’y rien comprendre. À moins que son père ne lui eût infligé de mauvais traitements ? Soupirant pour la seconde fois, Kaë se laissa tomber lourdement sur le matelas de son lit. Un sommeil léger le prit de court et il s’endormit pendant une petite heure avant que l’insomnie ne le gagne; il devait savoir sinon il n’aurait jamais l’esprit tranquille. Et si c’était vraiment le cas, le cher tailleur verrait de quel bois il se chauffait. Ainsi, le Lieutenant quitta son lit en agrippant sa chemise et l’enfila tout en la boutonnant pendant que ses jambes le portaient jusqu’à la chambre d’ami. Cependant, la porte était ouverte ...
Délicatement, Kaëran la poussa pour voir que la pièce était vide; Ellana manquait à l’appel. Elle avait donc quitté à l’insu de tous et sans dire au revoir ? Elle était folle ! La pluie tombait fortement dehors et c’était à peine pour dire si on voyait à un mètre devant soi. Mais au fond... c’était une étrangère et il n’en avait rien à cirer. Pourquoi s’en faisait-il pour elle dans ce cas ? Pourquoi s’inquiétait-il du sort qui l’attendait si elle retournait vivre auprès de son père ? Le jeune homme grogna et se retourna brusquement pour sortir de la maison après avoir enfilé ses bottes, ne prenant pas la peine de se couvrir. Quelle imbécile ... sortir en pleine nuit par un temps pareil ! Ça le faisait rager. Elle aurait au moins pu attendre le lendemain matin et il serait allé la reconduire ! Mais non ! Le voilà qui jouait au chaperon et qui lui courait après dans tout Racium ! Kaëran tourna un premier coin, rencontrant des passants qui couraient pour se mettre à l’abri, mais il les arrêta vite fait pour leur demander:
‘‘ Excusez-moi, auriez-vous vu une femme de taille moyenne, de longs cheveux noirs ? ‘‘
‘‘ Je ne me souviens pas, monsieur ... pardonnez-moi. ‘‘
Kaëran jura et continua sa route aux pas de course. À trois reprises il dut arrêter des gens et toujours rien. Il avait fait quelques rues et ruelles en espérant tomber sur Ellana, mais sans succès. Où pouvait t-elle bien être par tous les dieux ?! L’impatience le rongeait de plus en plus, le jeune homme s’arrêta à quelques mètres d’une bande d’hommes ivres qui sortaient de la taverne se trouvant à un coin de rue de là. L’un d’eux criait si fort qu’il réveilla un citoyen qui ouvrit sa porte pour lui dire de se la fermer. Mais le soulon répliqua en hurlant :
‘‘ Retourne te cloîtrer dans ta piaule, crétin ! Sinon je viens te casser les jambes ! ‘‘
La porte se referma et la lueur de la lanterne s’endormit dans l’ombre de la demeure alors qu’un autre homme donnait un faible coup de pied sur quelque chose adossé contre le mur de l’établissement . Fronçant les sourcils, Kaëran s’approcha et tira l'un des hommes vers l’arrière en le prenant par le collet.
‘‘ Hey ! ‘‘ Dit un voyou avec un air menaçant.
‘‘ Dégagez d’ici ... tout de suite ! ‘‘
‘‘ Qu’est-ce que tu dis, blanc-bec ?! Tu veux que je te fasse la peau peut-être ?! ‘‘
Celui-ci sortit un poignard et fit danser la lame entre ses doigts, espérant impressionner l’opposant qui ne réagissait nullement comme il le souhaitait. Au contraire, Kaë se moqua de lui d’un sourire en coin plutôt arrogant et flaquant un coup sur la main qui tenait la lame rapidement. Le voyou ne comprit pas sur le moment, mais vis sa dague dans une flaque de boue un peu plus loin.
‘‘ On devrait filer, j’ai déjà vu la tête de cet homme quelque part ... ‘‘
Ses congénères étaient tous de cet avis et on dut forcer le seul qui voulait se battre à les suivre pour laisser leur pauvre petite victime seule. Le Lieutenant lui suivit donc des yeux jusqu’à ce qu’ils disparaissent au-delà de la pluie qui s’abattait sur la ville, puis s’approcha afin de voir de qui il s’agissait. Quelle ne fut pas sa surprise de tomber en plein sur celle qu’il cherchait ! Posant alors un genou au sol, Kaëran observa sommairement son état afin de voir si ces imbéciles ne lui avaient pas de fait de mal, puis il le lui demanda directement par la suite.
‘‘ Est-ce qu’ils t’ont blessé ou fait quoi que ce soit d’autre ? ‘‘
La seule chose qu’Ellana trouva la force de faire était de répondre par la négative, secoua la tête très rapidement. Aucune parole et aucun regard. Rien. Au moins, elle n’avait pas de mal, mais elle grelottait à cause du froid et tremblait toujours autant de peur. Le Lieutenant soupira puis prit son menton du pouce et de l’index pour la forcer à le regarder. La jeune femme n’eut donc pas d’autre choix que de croiser son regard pour la première fois. Il ne cacha pas sa surprise à la vue de ses yeux de couleurs différentes, mais ne passa aucun commentaire parce que quelque chose d’autre attira son attention; elle pleurait. Des larmes roulaient sur ses joues pâles, mêlées à la pluie qui s’abattait sur eux avec acharnement, sans leur laisser une seule seconde de répit. Dans ce regard, il y avait de profondes blessures et une souffrance inexplicable. Kaë eut pitié d’elle et sa frustration s’envola d’un seul coup. Il aurait voulu la traiter d’imbécile seulement parce qu’elle avait fui sans prévenir en pleine nuit et sous cette pluie diluvienne, mais il ne put s’y résoudre. Alors il l’aida à se lever, prit son sac de sa main gauche et la ramena en direction de la maison pour qu’elle puisse se sécher et se réchauffer. Comme il s’en était douté, jamais Ellana n’avait opposé résistance et le suivait silencieusement jusqu’à ce qu’ils arrivent à destination. Kaë la conduisit jusqu’à la salle de bain, faisant un détour par sa chambre pour prendre une chemise propre et empoigna une longue serviette qu’il posa sur la tête de la jeune femme pour lui sécher les cheveux sans ménagement.
‘‘ Tu aurais pu me le dire que tu voulais partir cette nuit ... tu aurais pu tomber malade à traîner dehors par un temps pareil. ‘‘
Il laissa la serviette sur ses épaules et lui donna la chemise qu’il avait posée sur un petit banc près de la porte à moitié fermée.
‘‘ Sèche-toi et enfile ça. Tes vêtements devront sécher avant que tu puisses les remettre. Ensuite, viens au salon histoire de te réchauffer devant le feu. Je vais te faire du thé ... ‘‘
Sans attendre d’Ellana une quelconque réplique, Kaëran quitta la salle d’eau et referma la porte derrière lui pour s’en aller vers la cuisine et mettre de l’eau sur le feu. Cela ne prit que quelques minutes avant que son invitée ne s’exécute avec docilité, s’asseyant devant la cheminée. Le Lieutenant en profita pour aller se sécher à son tour et se changea en vitesse pour aller faire couler le thé et venir rejoindre la jeune femme près du feu.
‘‘ Tiens. ‘‘ Dit-il doucement en lui donnant la tasse. ‘‘ Fais attention, c’est chaud. ‘‘
Étirant le bras vers l’arrière, sa main prit le bout d’une couverture de laine qui trainait sur le fauteuil et la déposa sur les épaules d’Ellana surprise de ce geste, qui pourtant, était des plus normal pour le Lieutenant. Quand quelqu’un grelottait et qu’on voulait qu’elle reste au chaud pour ne pas attraper froid, on l’abrillait, non ? Alors, il le faisait naturellement, car même si cette jeune femme était une inconnue pour lui, il ne pouvait se résoudre à ne pas la traiter convenablement sous son toit.
‘‘ Tu n’as pas à t’en vouloir pour tout à l’heure... Ça m’a seulement surpris. ‘‘ Puis il marqua une courte pause, tournant son regard vairon vers elle. ‘‘ Est-ce ton père qui t’a demandé de faire ça ? ‘‘
Il ne savait rien d’elle et c’était une question comme une autre après tout. Si Ellana ne voulait pas répondre, c’était libre à elle.
‘‘ Écoute, Ellana. Tu n’as pas à avoir peur ici. D’accord ? Personne ne te fera de mal. Et je te le dis encore une fois; tu es chez toi ici. Mais si tu désires retourner chez ton père parce que tu n’es pas à l’aise de vivre ici, n’hésite pas à me le faire savoir. Sache que ta présence ne me dérange pas, mais je sais que quelque chose ne va pas ... ‘‘
Kaëran attendit un moment et remarqua que les tremblements de la jeune femme avaient repris. Sa tête s’était automatiquement abaissée pour cacher son visage dans l’ombre de cette cascade noire. Il se passait quelque chose, là il en était certain ...
‘‘ Ton père te faisait-il du mal ? ‘‘ Lui demanda-t-il. ‘‘ Si tu ne veux pas répondre, je te ne forcerai pas. Sens-toi libre de parler quand tu t’en sentiras prête... ‘‘
________________________________________________
Dernière édition par Kaëran Eira le Sam 4 Mai - 6:38, édité 1 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Ven 1 Fév - 22:20
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Sam 2 Fév - 9:01
________________________________________________
Chapitre 1 Le début d'une enquête
◆ ◆ ◆
Ellana semblait entrer dans un moment de panique et Kaëran craignait d’avoir touché la corde sensible ou plutôt la vérité. Seulement par sa réaction, ses tremblements et ses gestes, il voyait que la question qu’il avait posée venait d’atteindre quelque chose d’important. Mais la question restait toujours : quoi? En silence, le Lieutenant observait les mains de la jeune femme qui n’avait pas quitté la tasse, mais qui ne se leva pas une deuxième fois pour que le liquide se rende jusqu’à sa bouche. Elle avait bloqué, mais parla tout de même.
‘‘ Mon père n’a fait que ce qui est bon pour moi, Monsieur Eira. Tout ce qu’il a fait n’est que pour mon bien. Je dois me faire pardonner. Je dois être obéissante. ‘‘ Commença Ellana, marquant une courte pause. ‘‘ Monsieur Eira ne doit pas hésiter à me punir quand je vous déçois. Monsieur Eira ne doit pas me considérer autrement que comme un objet. Je ne suis rien, un monstre. C’est tout…c’est tout… ‘‘
Elle devait être obéissante ? Punie ? Considérée comme un objet ou un monstre ? Mais qu’est-ce qu’elle lui racontait là ! La frustration commençait à envahir le jeune homme qui fronçait graduellement les sourcils alors que sa mâchoire se crispait de plus en plus. Comment lui faire comprendre qu’elle était une personne comme une autre alors que ces principes semblaient si solidement ancrés en elle ? Ellana vivait dans un autre monde. Un enfer constant qui ne cessait jamais. Un cercle vicieux duquel elle était prisonnière. Stark semblait pourtant être un homme sympathique à première vue, mais sa fille était la plus craintive qu’il avait rencontrée dans sa vie. Kaë commença à se douter que cette jeune femme avait été victime de mauvais traitement et certainement une bonne partie de sa vie, mais depuis quand ? Déjà, il ne savait pas si elle pourrait s’adapter à une vie autre que celle qu’elle avait vécue auparavant, mes si ses craintes se confirmaient, il était hors de question qu’Ellana retourne chez son père ou que celui si l’approche sans l’autorisation du Lieutenant. La tête de la jeune femme se redressa légèrement, ses yeux regardant la tasse qu’elle tenait toujours, immobile sur ses genoux. Un liquide brillait sous la lueur des flammes. Elle ... pleurait ?
‘‘ Un monstre…parce que…parce que…j’ai…j’ai tué ma mère…mes yeux sont une malédiction, je n’ai pas le droit au bonheur, Monsieur Eira ne doit pas veiller sur moi. Surtout pas. Je ne le mérite pas. ‘‘
Le timbre de voix d’Ellana était bas, cassé et respirait la souffrance. Dans un dernier murmure, elle dit :
‘‘ Pardonnez-moi Monsieur Eira je n’ai pas le droit de parler. ‘‘
Ce qu’il venait d’entendre dépassait largement l’entendement et avait aiguisé sa frustration. D’un seul coup, le niveau avait monté. C’était inimaginable qu’un père puisse inculquer de telles valeurs à son enfant ! C’était tout simplement inhumain, immoral ! Comment pouvait-on traiter la chaire de sa chaire de cette manière ? Ça, c’était quelque chose qui dépassait Kaëran et sa vision des choses. Il fallait vraiment détester sa progéniture pour la traiter d’une telle manière, pour la détruire comme Ellana l’était par la faute de son propre père. Elle n’avait pas une once de fierté et écoutait au doigt et à l’oeil comme un chien qu’on avait dressé. Or, elle n’était pas un animal, mais bien une personne à part entière comme lui, Naël et n’importe quel individu de la cité.
‘‘ Je ne vois pas pourquoi tu ne mériterais pas d’être heureuse, Ellana. Tout le monde y a droit, même les criminels s’ils s’en donnent la peinent et si tu es maudite à cause de la couleur de tes yeux, je le suis moi aussi. Tu n’es pas un monstre. Pas sous mon toit du moins ... Tu es une personne à part entière dans cette maison et tu ne recevras pas d’ordre de personne. Tu peux parler sans autorisation, car tu es en droit de t’exprimer. Et tu peux boire ce thé, car je sais que tu en meurs d’envie, ça évitera de gaspiller. ‘‘
Bon voilà, c’était dit, car oui ça lui tapait un peu sur les nerfs de voir qu’il avait pris la peine de faire bouillir l’eau pour lui faire une boisson chaude en vue qu’elle se réchauffe et qu’au final, elle n’avait bu qu’une seule gorgée. Cependant, Kaëran crut comprendre qu’Ellana l’avait perçu comme un ordre et elle s’exécuta aussitôt. Dans un soupir, il secoua légèrement la tête et posa une main rassurante sur son épaule recouverte de la couverture de laine.
‘‘ Relaxe. Calme-toi... ce n’était pas un ordre, Ellana. ‘‘
Mais la jeune femme tremblait comme si elle attendait de recevoir une correction quelconque pour son geste alors que ce n’était nullement le cas. Elle avait la tête basse et ses doigts étaient crispés sur la tasse qu’elle tenait toujours, elle reniflait même. Kaëran prit son menton pour la seconde fois ce soir et la força à croiser son regard. C’était tellement plus facile de faire passer un message quand il y avait un contact visuel. Or, avec son invitée, il n’y en avait jamais.
‘‘ Tu n’as pas à avoir peur de moi, ni de quiconque dans cette maison. Jamais je n’ai levé la main sur quelqu’un et ce n’est pas aujourd'hui que ça commencera. Compris ? Si tu as effectivement vécu le calvaire avec ton père, ce ne sera pas le cas ici alors tu peux avoir la conscience tranquille. Mais s’il te-plait, cesse de m’appelle Monsieur Eira. Kaé suffira largement, sinon tu peux toujours prononcer mon prénom complet ... ‘‘
Ça l’horripilait de se faire appeler Monsieur. Il n’était quand même pas si vieux que ça, non ? Lui et le vouvoiement, ça faisait deux ! Alors au diable les politesses de bourg quand on était chez soi. Ainsi, Kaëran attendit qu’elle termine son thé une fois qu’il eut essuyé les larmes qui perlaient sur ses joues d’un pouce puis vint l’accompagner jusqu’à sa chambre. Le Lieutenant lui souhaita alors la bonne nuit puis ferma délicatement la porte derrière lui pour profiter des dernières heures qu’il restait à cette nuit passablement avancée. D’abord, Kaë passa devant la chambre de sa mère qui dormait paisiblement, toussotant de temps à autre, mais rien de bien grave, puis alla dans la sienne pour se dénuder de moitié et filer sous les couvertures. Après cette mésaventure, un peu de sommeil ne ferait pas de tort et puis il reprenait ses fonctions dans quelques heures... Espérons que les jours qui suivraient seraient plus motivants que ses prédécesseurs. Ce fut donc dans un dernier soupir que le jeune homme sombra dans les bras de Morphée.
Au petit matin, les premiers rayons du soleil commençaient à peine à entrer dans la chambre que’Eiriel débarqua en secouant vivement Kaëran qui se réveilla en sursaut. Son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine et il craignait que le pire ne soit arrivé à sa mère. Bondissant en dehors de son lit à toute vitesse, la femme corpulente ricana et leva les mains dans les airs.
‘‘ Du calme ! Je venais seulement te réveiller, car tu vas être en retard ... ‘‘
Il avait oublié ! N’ayant jamais été aussi pressé, Kaë quitta sa chambre en prenant des vêtements propres, se lava en quatrième vitesse, se changea et enfila son armure. Eiriel lui donna du pain qu’il se foutu dans la gueule et sauta dans ses bottes avant de sortir dehors aux pas de course sans avoir eu le temps de souhaiter le bonjour à sa mère et à Ellana qui venait tout juste d’ouvrir la porte de sa chambre. En cours de route, une question vint alors à l’esprit du Lieutenant. Si Ellana avait réellement tué sa mère, comment se faisait-il qu’elle fût en liberté ? Une femme comme elle, sans malice, ne pouvait parvenir à commettre une telle atrocité. Enfin bref, il ne se gênerait pas pour chercher quelques informations sur Monsieur Stark et sa famille une fois au palais. Après l’entraînement , bien entendu.
Spoiler:
[HRP: Je vais me relire une fois debout ... je cogne des clous U.U. Je te dis donc à plus tard !]
________________________________________________
Dernière édition par Kaëran Eira le Sam 2 Fév - 16:19, édité 1 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Sam 2 Fév - 10:20
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Sam 2 Fév - 18:28
________________________________________________
Chapitre 1 Une découverte bouleversante
◆ ◆ ◆
Jamais Kaëran n’avait dû courir aussi rapidement en direction du palais de si bon matin. Manger ce cette manière n’était pas non plus une habitude courante pour lui et la prochaine fois, il faudrait qu’il pense à cesser de déblatérer avec Ellana en plein milieu de la nuit et de se mettre au lit pour ne plus qu’une telle chose arrive. Ce fut donc essoufflé que le Lieutenant débarquât dans la salle d’entraînement où un de ses frères d’armes avait pris le relais histoire de ne pas trop faire trainer les choses. Le soldat reprit les rangs suite aux remerciements de son supérieur qui re prenait son souffle au fil des secondes; une chance qu’il était en bonne forme physique ! Bref, une longue heure s’écoula ou ne cessait, une fois de plus, de ramener à l’ordre les nouvelles recrues qui voulaient jouer au plus malin histoire de se croire supérieur. L’air que leur jeta le Lieutenant n’avait rien pour les rassurer et ils comprirent rapidement leur erreur, car, dans les secondes qui suivirent, les cinq adolescents se retrouvaient allongés au sol sur le ventre et durent faire plusieurs pompes. Ils voulaient jouer à ce jeu avec lui, alors ils en subiraient les conséquences. C’était équitable, non ? Enfin, pour Kaëran oui. Ces blancs-becs allaient comprendre qu’ils ne se situaient pas en haut de l’échelle dès leur intégration parmi les rangs de l’armée de Racium.
Les recrus furent laissés tranquilles seulement lorsque leurs bras ne furent plus en mesure de se tendre convenablement et qu’ils tremblaient. Satisfait, Kaëran les laissa se redresser et les chassa puisqu’ils ne restaient qu’eux, les autres soldats ayant quitté la salle depuis une bonne dizaine de minutes déjà.
‘‘ Recommencez ça une seconde fois et vous devrez faire 10 fois le tour du palais en entier aux pas de course. Me suis-je bien fait comprendre ? ‘‘
‘‘ Oui, Lieutenant ! ‘‘
Les hommes quittèrent donc la vaste pièce et Kaëran se dirigea vers son bureau afin de jeter un oeil sur les requêtes de la journée. Pour une fois, on ne l’avait pas surchargé, mais bon ... c’était la partie ennuyante de son travail qui lui permettait de se détendre et d’être au calme. À peine eut-il le temps de s’assoir que son confrère et ami toqua à la porte, entrant sans attendre la permission d’ouvrir. Celui-ci approcha du bureau et l’observa un moment en silence puis posa son regard sur celui du Lieutenant.
‘‘ C’est bien la première fois que tu es en retard ... comment va ta mère ? ‘‘
‘‘ Elle a recommencé à faire de la fièvre et sa toux devient un peu plus violente chaque jour. Il ne lui reste plus beaucoup de temps, je le sens et elle aussi. Eiriel s’occupe d’elle et Ellana aussi. ‘‘
Le sourcil du soldat, Ayden, se releva dès qu’il entendit un nouveau nom. Jamais il n’avait entendu ce prénom féminin prononcé par son ami de longue date avant aujourd’hui. Avait-il loupé un truc où c’était Kaëran qui jouait au cachotier ?
‘‘ Tu ne m’avais pas dit que tu avais une nouvelle copine. Ellana ... jolie comme prénom. Tu comptais m’annoncer ça quand ? ‘‘
‘‘ Ce n’est pas ... ce que tu crois, Ayden. Elle n’est pas ma copine et c’est assez compliqué comme situation. Je t’expliquerai une autre fois, seulement là je suis occupé. Mais ... ‘‘ Lança t-il. ‘‘ Que connais-tu du tailleur, Stark ? ‘‘
Ayden parut confus l’espace de quelques secondes, mais la curiosité le piqua à vif dès que son Lieutenant lui demanda des informations sur le fameux tailleur de Racium. Il posa alors ses mains à plat sur le bureau et replongea dans ses souvenirs avant de répondre à la demande.
‘‘ On dit qu’il est avare et aime bien arnaquer ses clients en vendant ses fournitures à des prix un peu plus élevés qu’ailleurs. Cependant, on ne lui reproche pas son travail, car il fait des choses remarquables. ‘‘
‘‘ Et concernant sa femme ? ‘‘
‘‘ Il est veuf. Elle est morte en couche il y a plusieurs années à ce qu’il paraîtrait Des rumeurs courent qu’ils auraient eu un enfant, mais jamais on ne le vit sortir de la demeure familiale et Stark n’en a jamais vraiment parlé ... Pourquoi veux-tu savoir tout ça ? Tu le soupçonnes de quelque chose ? ‘‘
Kaëran tournait sa plume dans ses doigts et réfléchissait, tentant d’assembler les morceaux comme il le pouvait pour comprendre. Il fronça les sourcils et ne comprit pas pourquoi Ellana disait avoir tué sa mère si elle était véritablement la fille de Stark. M’enfin, il avait amplement le temps de mettre tout ça au clair une fois que son frère d’armes aurait quitté son bureau. D’ailleurs, celui-ci lui demanda :
‘‘ Kaëran ... qu’est-ce que tu caches ? ‘‘
‘‘ Tu le sauras bien assez tôt. Maintenant, ouste que je puisse terminé mon travail. ‘‘
Haussant les épaules d’incompréhension, Ayden s’exécuta et laissa son Lieutenant seul. Le silence revint d’un coup et Kaë dut se concentrer à ne pas résoudre l’affaire Stark. Du moins, pas tant qu’il n’aurait pas terminé de vérifier cette tonne de parchemin qui le regardait avec leur faux sourire sur le coin du bureau. Terminant sa besogne deux petites heures plus tard, une feuille de parchemin vierge fut déposée sur le bois du meuble, juste devant le jeune homme. La plume fut trempée dans l’encrier pour une énième fois et il commençait à écrire ses pensées* puisqu’il avait encore quelques petites heures à tuer avant de retourner à la maison. De fil en aiguille, les mots prenaient doucement naissance sur le papier-parchemin, et ce, jusqu’à ce que les cinq coups de cloches s’échappèrent de la cathédrale de Racium. Puissants et sonores. Kaëran rangea soigneusement le tout et quitta l’endroit en vue de se diriger vers la maison familiale. À son arrivée, Eiriel avait déjà presque terminé de faire le repas du soir avec l’aide d’Ellana et Naël étira le cou tant bien que mal pour voir son fils qui entrait dans la vaste pièce, cuisine et salon ne formant qu’un, mais qui était bien séparés tout de même.
‘‘ Bonsoir m’man ‘‘
‘‘ Bonsoir mon chéri ‘‘ Dit-elle en souriant, attendant le baiser sur le front de son enfant.
‘‘ Et nous ? Tu nous oublies ? Tu nous ignores? ‘‘
Kaëran soupira et se retourna vers Eiriel qui avait posé les poings sur ses hanches, un faux air sévère peint sur le visage. Cependant, un sourire s’y dessina et ce fut cela qui la trahit. Avançant vers elle, le jeune homme vint lui faire un câlin et la souleva de terre. Eiriel ne put retenir un cri de stupeur et éclata de rire aussitôt qu’elle fut redéposer au sol.
‘‘ Bonsoir Eiriel, Ellana. ‘‘
Puis il retourna dans le couloir en se débarrassant des petites pièces de son armure pour les porter à sa chambre et redescendit au rez-de-chaussée pour monter la table, le temps que les femmes terminent de préparer les couverts. Naël fut apporté à sa place par son fils qui l’installa confortablement et ils prirent tous place à table, Eiriel compris.
‘‘ Et puis, ta journée ? ‘‘
‘‘ Des recrus qui se croient être le nombril du monde, mais ils ont vite compris que ce n’était pas la bonne voie à suivre. ‘‘
Naël ne put qu’esquisser un sourire en coin aux dires de Kaëran qui parlait avec un extrême sérieux. Elle avait toujours du mal à croire qu’il était Lieutenant à un aussi jeune âge. Mais il dégageait cette assurance et cette maturité que peu d’hommes de son âge avaient. Ce qu’elle pouvait être fière de lui, malgré les bêtises qu’il avait pu faire depuis qu’elle était tombée malade. Mais bon, ce n’était pas si dramatique que ça sauf qu’elle redoutait le pire une fois qu’elle serait partie dans l’autre monde. Les yeux émeraude de Naël se posèrent alors sur Ellana qui restait bien muette alors que Kaë et Eiriel conversaient tranquillement. Peut-être qu’avec elle à ses côtés, il y avait une faible chance que son fils ne sombre pas ... si seulement il ne la repoussait pas une fois le jour fatidique arrivé.
Après le repas, ce fut l’homme de la maison qui s’occupa de nettoyer les couverts alors qu’Eiriel s’occupait de la toilette de Naël dans la salle d’eau. Il fallait bien quelqu’un pour lui faire prendre son bain quand même et ce n’était certainement pas on fils qui allait s’en charger. C’était bien trop gênant ... Cette fois, il accepta l’aide d’Ellana, l’aidant à essuyer et à ranger le tout. Finalement, il la remercia pour le coup de pouce, car il y avait pas mal de choses sales qui trainaient sur le comptoir. La large bassine fut vidée à l’extérieur puis essuyée avant d’être rangée, libérant ainsi l’espace. Naël finit par sortir, les cheveux humides et Kaëran prit le relais, permettant à Eiriel de tenir compagnie à Ellana qui se trouvait dans le salon. La mère put alors profiter de ce moment pour passer à l’interrogatoire. Les sourcils froncés, Naël regarda son fils jusqu’à ce qu’il croise son regard; il comprit et alla fermer la porte de la chambre pour revenir s’installer sur un fauteuil qu’il approcha du lit.
‘‘ Ellana m’a dit que tu ... l’avais acheté. Dis-moi que ce n’est pas vrai, Kaë. ‘‘
‘‘ M’man ... je ... ‘‘
Le Lieutenant posa une main sur sa nuque et la frotta d’embrassement alors que sa mère semblait de plus en plus inquiète de la vérité. Elle poursuivit alors pour l’aider à cracher le morceau.
‘‘ Tu étais ivre, pas vrai ? C’était le jour où tu l’as ramené à la maison ? ‘‘
‘‘ Oui, j’avais un peu trop bu et ... Stark s’est mis à me parler de sa fille. Je l’écoutais à moitié avec la seule envie de le voir partir pour que je sois seul. Mais j’ai raté la fin de la conversation et je n’ai compris que le point de rendez-vous. Je me suis présenté sur place, mais lorsque j’ai su, j’ai refusé. Je lui ai donné ma bourse, car il ne voulait que l’argent sauf qu’il semblait pressé de se débarrasser de sa fille et nous a jetés dehors alors ... je l’ai apporté ici ... ‘‘
Oui, en y repensant, Kaëran avait honte de son comportement. Mais maintenant, il croyait plus que tout que la jeune femme était mieux parmi eux que là bas, avec son paternel.
‘‘ Je crois qu’elle a été maltraitée ... non, j’en suis certain. Elle m’a dit se considérer comme un monstre, un objet. Ça me dépasse alors j’ai tenté de trouver des informations sur sa famille. ‘‘
‘‘ Kaë ! Ça ne te regarde pas ce genre de chose, mais ... ‘‘ Elle soupira. ‘‘ Je suis moi aussi inquiète pour elle. Cette petite souffre atrocement. Son regard dit tout et ça me fait mal de voir quelqu’un dans un tel état. ‘‘
Naël ferma les yeux et baissa la tête un long moment, prenant la main droite de son fils et l’entourant des siennes. Il fallait qu’elle lui demande quelque chose, mais son coeur battait la chamade tout au fond de sa poitrine, car elle désirait plus que tout qu’il accepte. Cependant, le choix lui appartiendrait.
‘‘ Je ... sais que je dérive sur le sujet de la conversation, mais Kaëran ... ‘‘
Son regard émeraude plongea dans celui de son fils, admirant cet oeil mélangé de bleu et de vert qui le rendait unique en son genre. Un faible sourire se dessina sur ses lèvres dès qu’il vit le regard inquiet de son fils se poser sur elle, insistant dans le silence pour qu’elle parler.
‘‘ Il ne me reste plus beaucoup de temps et tu le sais autant que moi. J’aimerais seulement voir ton sourire une dernière fois avant de partir, mon chéri ... et que tu prennes soin d’elle. Ellana a besoin de quelqu’un sur qui s’appuyer. C’est une bonne fille malgré la douleur qui la submerge. ‘‘
‘‘ Je ... vais y réfléchir ... ‘‘ Répondit-il dans un murmure évasif.
Naël se tut et laissa son fils lui tresser les cheveux lorsqu’elle lui en fit la demande. Eiriel entra entre temps, accompagnée d’Ellana, car elle devait partir chez elle vu l’heure.
‘‘ Comme c’est trognon ! Fiston qui joue dans les cheveux de maman ! ‘‘
‘‘ Hey ! Ne me déconcentre pas ! Je suis sans défense et j’ai les doigts occupés ... j’ai merdé là. ‘‘
Kaëran grogna et dut recommencer la tresse sous les rires de Naël et d’Eiriel qui se souhaitèrent la bonne nuit. La mère invita donc Ellana à venir prendre place à ses côtés, pendant que son fils semblait extrêmement concentré par ce qu’il faisait. Oui il mettait une éternité, mais il était loin d’être doué pour coiffer les cheveux d’une femme et encore moins les siens. D’où la raison du pourquoi ils étaient toujours en pétard.
Dernière édition par Kaëran Eira le Dim 5 Mai - 5:41, édité 2 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Sam 2 Fév - 21:25
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 7:32
________________________________________________
Chapitre 1 Comme un ange gardien...
◆ ◆ ◆
Kaëran était bien concentré sur sa tâche et ne détournait aucunement les yeux de la longue tignasse rousse foncé de sa mère, mouvements autour d’eux ou pas. S’il avait le malheur de le faire, tout serait gâché et il lui faudrait recommencer pour la troisième fois. Alors, il en était hors de question puisque ça lui prenait déjà un temps fou à ne faire que cette tresse qui pourtant était si simple. Cependant, il ne manqua pas de sentir le regard d’Ellana qui avait pris place avec Naël sur le lit, regardant ses doigts croiser les mèches de cheveux. Lorsqu’il eut enfin terminé, Kaëran noua l’extrémité à l’aide d’une fine cordelette de cuir noire et montra le résultat à sa mère, ramenant sa crinière coiffée par-dessus son épaule gauche. Satisfaite de ce travail, la femme caressera de ses mains pâles la tresse et souriait doucement.
‘‘ Elle est vraiment très belle. Tu ne trouves pas Ellana ? ‘‘
‘‘ Si. Elle est très belle Madame Naël. ‘‘
‘ ‘ J’espère bien parce que je peine à faire ce truc... ‘‘
Le regard souriant de la mère quitta Ellana qui était en totale admiration devant cette tresse puis se posa sur son fils qui croisait les bras sur son torse. Il lui intima même de ne pas bouger d’un seul poil pendant la nuit au risque que des mèches de cheveux s’échappent de la peignure, mais Naël ne put se retenir de rire, car elle comprenait que Kaë n’était en aucun cas sérieux dans ses propos. Soudainement prise d’un coup de fatigue, la mère demanda l’aide de son fils pour s’allonger dans son lit et il s’exécuta doucement, embrassant son front et lui souhaitant la bonne nuit. Ainsi, les deux jeunes gens quittèrent la chambre en refermant la porte derrière eux, Kaëran reconduisant Ellana jusqu’à la pièce où elle logeait. Ensuite, ce fut son tour. Cette fois-ci, le Lieutenant ne prit qu’une dizaine de minutes avant de trouver le sommeil, fatigué de sa journée Le lendemain matin, il n’eut pas de mal à se réveiller comme la veille et alla tirer sa mère hors du lit, celle-ci déjà debout depuis belle lurette. L’asseyant sur sa chaise, Kaë s’occupa de préparer le petit-déjeuner, comme tous les matins, et ils attendirent qu’Ellana vienne les rejoindre, ce qui ne tarda pas d’ailleurs.
‘‘ Bonjour Ellana vient manger, nous t’attendions. ‘‘
Mais la concernée les salua d’un bref signe de tête et prit place avec hésitation à table. Elle était toujours mal à l’aise, mais peut-être que l’habitude à ce mode de vie finirait par s’installer chez elle ? C’était à espérer du moins. Terminant de manger le premier, Kaëran dut quitter la table pour retourner au travail. Il s’excusa donc, donna un bis sur la joue de sa mère, salua Eiriel qui venait prendre le relais et fila vers le palais d’un pas plutôt rapide. Il n’était pas en retard, mais même; ce serait une grosse journée, il le sentait.
La journée s’annonçait déjà bien mauvaise ... oui. Bien mauvaise ... Encore une fois, les recrues jouaient à la tête brûlée et Kaëran dut réagir avant qu’une bagarre n’éclate entre eux et quelques soldats. Ils reçurent des menaces d’expulsion s’ils ne prenaient pas les entraînements au sérieux et durent, comme promis la veille, faire 10 tours du palais. Puis-je vous dire que ces jeunes arrogants rampaient déjà au 5e tour ? Si c’était la seule manière de leur mettre du plomb dans la tête, alors soit. Mais au moins, ils finirent par comprendre quelque chose. Enfin bref. Le reste de la matinée fut consacrée à la patrouille de la ville afin de veiller sur le bien-être de Racium. Une mission de routine, il fallait s’en dire. En fin de journée, Kaëran rédigea alors son rapport puis quitta le palais pour s’en retourner chez lui. Eiriel et Naël se trouvaient toutes deux assises sur le canapé et regardaient Ellana se taper la coupe des légumes pendant que le reste du repas cuisait dans une marmite. Ne posant pas de question, le jeune homme les salua et elles en firent de même, cependant, l’invitée ne réagit aucunement. Qu’avait-elle soudainement ? La table était déjà montée, les couverts placés et dès que quelqu’un tentait de s’approcher du ragoût, Ellana débarquait et s’en chargeait. Kaëran dut donc se résoudre à aller s’assoir à côté de sa mère qui ne comprenait plus rien.
‘‘ Je ne sais pas quelle mouche l’a piqué... Elle n’a pas dit un seul mot et ne nous laisse aucunement l’opportunité de faire quoi que ce soit de demandant.‘‘
‘‘ Il s’est passé quelque chose dans l’après-midi ? ‘‘
‘‘ Je ne crois pas non. Elle est ainsi depuis qu’elle est revenue de la boutique de couture. ‘‘
‘‘ Attends. ‘‘ Commença t-il. ‘‘ De la boutique de couture ? ‘‘
Naël acquiesça d’un signe de tête et fronça les sourcils lorsque son fils baissa les yeux, la mine sévère d’un seul coup. Ses yeux vairons se levèrent alors vers la jeune femme. Avait-elle échangé avec son père ? Étrangement, il n’en doutait pas une seule seconde, mais ne commenta pas. Il dit seulement, dans un murmure que seule sa mère pouvait entendre :
‘‘ Il ne faut plus qu’elle s’y rende seule... et si son père débarque ici, je veux qu’on me prévienne sur-le-champ. J’aurai deux mots à lui dire. ‘‘
La mère acquiesça d’un signe de tête et le repas fut servi dans le plus grand des silences. Ellana ne s’installa pas avec eux pour le repas, s’exilant plutôt dans le salon. Nombre de fois Naël lui avait demandé de venir les rejoindre à table, mais la jeune femme secouait négativement la tête sans même se retourner pour leur jeter un coup d’oeil. Le regard émeraude de la mère se posa donc sur son fils qui ne comprenait que de moitié ce soudain revirement de situation. Mais pour l’heure, il fallait manger. Les Eira laissèrent donc un couvert vide pour Ellana, lui signifiant qu’il fallait qu’elle se remplisse l’estomac et Kaëran alla conduire sa mère dans sa chambre pour la coucher et discuter un peu avec elle une fois qu’ils eurent rempli leur estomac. Sa fièvre avait encore augmenté et sa toux se faisait un peu plus régulière.
‘‘ Va dormir ... ça ira, mon grand. ‘‘
Le Lieutenant posa ses lèvres sur son front, peu rassuré, et tira les couvertures jusqu’aux épaules de sa mère qui lui sourit une dernière fois avant de fermer les yeux. La porte de la chambre fut donc refermée derrière lui, mais lorsque le jeune homme se présenta dans le salon, Ellana avait disparu et le couvert avait été rangé. Fronçant les sourcils, il y déposa ce qui restait du repas et se rendit jusqu’à la chambre d’ami où il toqua. Mais pas de réponse.
‘‘ Ellana, il faut que tu manges un peu. ‘‘
Mais toujours aucun signe de vie. Kaë soupira et déposa l’assiette au sol pour ensuite se rendre à sa chambre. Le lendemain matin, ce fut différent de la veille. Le repas était déjà prêt au réveil de Naël et Ellana était dans une lancée de ménage. Aucune parole n’était sortie de sa bouche depuis hier soir et c’était des plus étrange même si elle était du genre silencieux. C’était surtout dans ses gestes qu’on voyait la différence; elle ne les laissait aucunement toucher aux tâches ménagères et aux repas. Rien. Elle faisait tout. Ne pouvant s’attarder plus longtemps à la maison et poser des questions à la jeune femme, Kaëran dut quitter comme à l’accoutumée et ce, jusqu’en fin de journée. Pour faire court, la soirée se passa de la même manière que la veille et une autre journée s’écoula ainsi sauf que quelque chose de plus grave arriva. Eiriel était allé voir Naël dans sa chambre et entendait sa forte respiration. Sa fièvre avait monté d’un cran et sa toux était creuse. Cela faisait quelques heures que Kaëran avait quitté pour aller au palais et elle ne pouvait se résoudre à le laisser dans l’ignorance et puis son amie avait besoin de son fils plus que jamais dans cette épreuve. Ils devaient passer ces derniers moments ensemble, car le temps était maintenant compté. Quittant la chambre rapidement et en panique Eiriel dit à Ellana :
‘‘ Je m’en vais chercher Kaëran ... Naël est dans un mauvais état. Veille sur elle pendant mon absence ! ‘‘
Et elle partit en vitesse dans la ville. Elle mit bien une bonne vingtaine de minutes à rejoindre le palais et dès qu’elle croisa un soldat, elle s’empressa de demander à voir Kaëran. On lui dit alors qu’il était en réunion avec ses supérieurs, mais de sa voix portante, Eiriel lui hurla dessus prétextant qu’il s’agissait d’une urgence. Le soldat sursauta et ils se rendirent à la grande salle. C’est alors qu’ils débarquèrent devant une porte de bois massif ornementé de fer forgé par des artisans soucieux des détails. Ne se faisant pas prier, la femme ouvrit la porte qui grinça légèrement.
‘‘ Naël est mourante, il faut que tu reviennes à la maison ! ‘‘
Toutes les personnalités présentes se retournèrent vers Eiriel qui se fichait de recevoir tout ces regards. Kaëran avait blêmi d’un seul coup en reconnaissant cette voix, s’excusant au chef des armées qui lui donna son accord d’un signe de tête. Le Lieutenant s’excusant alors et quitta son siège rapidement pour rejoindre Eiriel qui reprenait tant bien que mal son souffle.
‘‘ Retourne à la maison ... je t’y rejoins. Ta mère ne va vraiment pas bien, Kaë... ‘‘
‘‘ J’y vais de ce pas ... merci. ‘‘
Sans perdre une seconde de plus, le jeune homme prit ses jambes à son coup et courut comme jamais il n’avait courut, bousculant sans le vouloir un homme au passage. Il s’excusa sommairement et entra dans sa demeure, la porte claquant violemment contre le mur. Sans prendre le temps d’enlever ses bottes ou son armure, Kaëran vint s’assoir sur le bord du lit de sa mère qui peinait à ouvrir les yeux. Un faible sourire se dessina alors sur ses lèvres et elle chercha les mains de son fils, qui caressaient déjà l’une de ses joues.
‘‘ Tu n’as pas à demander pardon ... tu n’as jamais voulu de cette maladie et je ne peux pas t’en vouloir pour ça ... Je vais rester avec toi pour quelques jours. Le temps que ... ça s’arrange. ‘‘
‘‘ Mer... merci ... Kaë ... ‘‘
Naël referma les yeux, laissant son fils lui éponger doucement le visage. Jamais le jeune homme n’avait aussi craint la mort de sa mère ... c’était comme s’il commençait à en prendre conscience, comprenant qu’elle partirait vraiment dans les jours qui allaient suivre. Peut-être cette nuit, voire demain ? Cette pensée le fit frissonner d’horreur et le Lieutenant baissa la tête. Lentement, sans perdre Naël des yeux, il approcha le fauteuil et y prit place, veillant sur la malade qui pâlissait sans cesse.
‘‘ Je veillerai sur toi. C’est promis... ‘‘ Dit-il en serrant les mains de Naël dans les siennes.
C’était seulement inimaginable pour lui de perdre sa mère aussi jeune. Pourquoi avait-il fallu que ce soit elle qui tombe malade et pas une autre personne ? Pourquoi les dieux n’avaient-ils pas été cléments à son égard ? Franchement, ils auraient au moins pu lui épargner cette souffrance et lui offrit une mort plus belle que celle qui l’attendait; dans la souffrance. C’était tout simplement injuste ... mais que pouvait-il faire d’autre que de la soutenir par sa seule présence, lui qui était si souvent absent depuis les dernières semaines ? Naël rouvrit de nouveau les yeux et tourna lentement la tête de côté pour observer son fils qui posa son regard sur elle, rongé par l’inquiétude. Elle fit alors un faible sourire, serrant comme elle pouvait les doigts de son fils dans ses mains et profitant de la douce chaleur qu’elle pouvait en retirer.
‘‘ Tu sais ce qu’Eiriel ... m’a déjà dit ? Que si elle avait eu... une fille de ton âge, elle t’aurait forcé... à l’épouser pour que tu sois sans cesse chez elle ... Sinon, qu’elle aur-aurait souhaité... être plus jeune pour te tourner ... autour! ‘‘
La mère fut prise d’une violente toux, mais retrouva rapidement le sourire.
‘‘ C’est une sacrée Eiriel ... ‘‘ Murmura t-il, souriant sincèrement pour la première fois depuis un certain temps.
Naël fut tellement heureuse que ses yeux se remplissent aussitôt de larmes qui coulèrent sur ses joues blêmes et chaudes. Elle essaya de s’assoir par elle-même, mais Kaëran dut se lever alors qu’en fait, tout ce qu’elle désirait était un câlin.
‘‘ Dis ... Tu ne voudrais... pas bercer... ta mère ? ‘‘
La demande surprit le Lieutenant sur le coup, mais il lui fit un doux sourire en coin acquiesçant à sa demande. Délicatement, Kaëran passa une main sous ses genoux puis l’autre dans son dos et la souleva pour ensuite aller s’assoir dans le fauteuil où il la serra contre lui. Naël avait des airs de gamine ainsi lové dans les bras de sa progéniture dont le visage s’attristait. Tous deux fermèrent les yeux, laissant le silence planer sur eux pour ne profiter que de ce moment qu’ils ne pourraient plus avoir dans un avenir prochain. C’est ainsi que Naël s’endormit, Eiriel les observant depuis l’embrasure de la porte, un sourire triste peint sur les lèvres.
C’était un spectacle touchant qu’elle n’aurait la chance de voir qu’une seule fois dans sa vie, car son amie allait bientôt la quitter pour un monde meilleur, où elle n’aurait plus à souffrir et inquiéter ses proches.
Car son amie allait bientôt quitter les gens qu’elle aimait pour rejoindre son homme là haut ... Car son amie allait bientôt délaisser son fils ... Car son amie allait bientôt cesser de souffrir ...
________________________________________________
Dernière édition par Kaëran Eira le Dim 3 Fév - 17:18, édité 1 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 10:47
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 17:17
La respiration creuse et sifflante de la mère s’était quelque peu affaiblie alors qu’elle avait réussi à s’endormir. Sa toux elle, se faisait moins fréquente mais bien présente. C’était ce qui les réveillait la nuit, elle et son fils. Celui-ci regardait son état en posant une main sur son front puis dans son cou et Naël grimaçait sous la douleur qui envahissait sa gorge en entier. Elle souffrait, ça brûlait et chaque gorgée d’eau qu’on lui donnait était un réel supplice, mais en même temps, elle avait si soif ... Le sommeil les regagna un peu plus tard et Kaëran ne dormait que d’un oeil, veillant sur sa mère comme sur la prunelle de ses yeux. Les premiers rayons du soleil ne s’étaient pas encore faufilé de jusqu’aux carreaux de la demeure que Naël se réveilla brusquement, secoué d’une violente toux. Ses doigts se crispaient sur le tissu de la chemise de son fils qui ouvrit les yeux, pris d’une soudaine inquiétude; elle ne cessait de gémir et sa fièvre avait doublé depuis la nuit. C’est alors que les yeux émeraude de la maman se levèrent sur ce chef-d’oeuvre suspendu au mur à quelques mètres d’eux. Kaëran l’imita, se demandant pourquoi elle souriait à ce point et ne manqua pas de voir une splendide robe. Il ne comprenait pas comment elle avait abouti là ... était-ce Eiriel qui avait acheté ceci ? À vrai dire, jamais il n’avait vraiment remarqué qu’Ellana travaillait sur ce projet alors que pourtant, cette couleur était difficile à manquer.
‘‘ C’est ... Ellana qui l’a ... fait ... pour moi ... ‘‘ Lui expliqua-t-elle d’une voix faible.
Cet aveu le surprit, mais par la suite ... quel idiot. Elle était la fille d’un tailleur alors elle devait connaître le métier. Normal qu’elle puisse coudre au final. Mais cette Ellana avait beaucoup de talent et savait à coup sûr trouver les bonnes couleurs pour mettre une personne en valeur. Kaëran se fit surprendre à sourire légèrement et une main tremblante et froide se posa sur l’une de ses joues; Naël pleurait, mais souriait. Étirant le cou, elle déposa un baiser sur son front et se sera contre lui, accotant la tête de son fils contre une épaule. Ses doigts glissèrent dans sa chevelure et elle murmura :
‘‘ J’aurais ... voulu rester plus ... longtemps ... te voir devenir un ... grand homme... te ... voir heureux ... à nouveau ... ‘‘
‘‘ Maman ... ne dis pas de telles choses. Je suis heureux ... Comment pourrais-je ne pas l’être avec une mère comme toi ? ‘‘
La gorge du Lieutenant se serra et les mots se bloquèrent d’un seul coup. Il avait tant à lui dire avant qu’elle ne le quitte à tout jamais. Il voulait se remémorer les bons souvenirs qu’ils avaient passés ensemble durant ces dernières années, rire une dernière fois avec elle, mais au lieu de ça, une profonde tristesse se dessina sur son visage et il ferma les yeux ne voulant pas que les larmes s’en échappent. Il les sentait venir et les refoulait aussitôt. Rester fort et droit pour Naël. La mère lui releva la tête doucement et prit son visage dans ses mains, attendant qu’il ouvre les yeux pour avoir le loisir de l’observer et de l’apporter avec elle dans sa tombe.
‘‘ Kaë ... promets-moi ... que tu ne feras ... pas de ... bêtises ... et ... prends soin ... d’elle. ‘‘
Son sourire ne quitta pas son visage alors que le regard vairon du jeune homme plongeait dans le sien, le gravant dans sa mémoire. L’heure arrivait, il le sentait et son coeur commença à battre frénétiquement. Un long et profond soupir s’échappa des poumons de Kaëran qui commençait à avoir peur de voir sa mère rendre son dernier souffle. Il ne parvenait pas à dire quoi que ce soit, étant devenu muet. C’était comme s’il y avait une corde autour de son cou et que celle-ci se serrait en étouffant les sons. C’était ... étrange comme sensation à vrai dire. Mais Naël patientait et ne bougeait pas, attendant la voix de son fils qui mit des minutes interminables à sortir de son terrier.
‘‘ C’est promis... ‘‘
La mère entoura le cou de son fils et colla sa joue gauche contre la tête de sa progéniture qui l’entourait fortement de ses bras. Il ne voulait pas qu’elle parte, pas tout de suite ... Pas elle ! Cette maladie qui la rongeait depuis un an était une calamité et s’il avait pu la prendre pour lui éviter cette souffrance, Kaë l’aurait fait sans hésitation. Naêl ne méritait pas de mourir de cette façon. Pas aussi jeune ! Inconsciemment, les mains du jeune homme serraient le tissu du chemisier de sa mère, devenu trop grand pour elle tellement elle avait perdu du poids.
‘‘ Ça ira ... tu ... verras ... Le temps ... finira par effacer ... ta peine mon ... chéri. ‘‘
‘‘ Mais qu’est-ce que tu me chantes là ?! Jamais elle ne s’effacera ... Ta chambre sera vide, la maison sera vide et toi, tu seras partie. Tu ne seras plus là. Je ne pourrai plus te voir je ... ‘‘
Kaëran fronça les sourcils sentant sa voix secouée de tremblement qu’il ne parvenait pas à contrôler. Tout lui glissait entre les doigts et il ne savait comment reprendre son sang-froid et se maîtriser. Il ne pouvait tout de même pas se morfondre et pleurer alors que sa mère lui souriait, sur son lit de mort ! Naël se détacha comme elle put et posa son front brûlant contre celui de son fils. Du pouce, elle essuya la seule larme qui avait réussi à se frayer un chemin sur sa peau et il ferma les yeux, envahit par la frustration, la peur et la tristesse.
‘‘ N’aie pas peur de ... parler ... Kaë ... Eiriel est là ... sinon ... ‘‘
Parler .... parler de quoi ? Parler pour râler ? Parler pour déverser sa rage et sa peine de manière verbale à quelqu’un ? À quoi cela servait-il ? À rien ... il garderait tout pour lui, car il serait capable de se relever seul. Du moins, c’est ce qu’il tentait de croire car une autre partie de lui était déjà profondément atteinte et hurlait sa douleur.
‘‘ Je suis ... si fière de toi ... je ... je t’aime ... mon grand ... ‘‘
La mère se colla contre son fils et ferma les yeux, croisant ses doigts avec ceux du jeune homme qui baissa son regard sur elle. Elle partait. Lentement, mais elle partait ...
‘‘ Je t’aime aussi m’man ... ‘‘ Murmura t-il.
Un dernier sourire se dessina sur les lèvres de Naël qui poussa un long et profond soupir. Elle venait de rendre son souffle de vie à la terre qui l’avait mise au monde et montrer toutes ses merveilles. Cette femme avait eu une vie passablement difficile, mais l’avait surmontée tant bien que mal et avec le sourire. Toujours, elle avait eu la tête haute et même dans les moments difficiles, la mère restait forte et fonçait.
Kaëran la regarda. Elle était là, endormie à tout jamais, la tête contre son épaule et un faible sourire aux lèvres. Leurs doigts se lâchèrent graduellement. Jamais le jeune homme n’avait remarqué la présence d’Eiriel qui pleurait en silence à quelques mètres du fauteuil. Ses yeux argentés ne quittaient pas la scène. Elle voyait le Lieutenant serrer le corps inerte de sa mère contre lui et murmurer des choses qu’elle n’entendait pas, puis la tête basse et la mâchoire serrée, il alla dans la chambre de Naël pour la coucher sur le lit et sortit par la porte arrière qui donnait sur un petit jardin. Voilà ... après une longue année de lutte, la maladie avait eu raison de la fleuriste rousse qui brillait comme un soleil sur la vie de bien des gens. Elle avait rendu l’âme avec un sourire aux lèvres, laissant les siens derrière elle à contrecoeur. Maintenant, elle ne souffrirait plus jamais et était allée rejoindre son soldat là haut.
La tête entre les mains, ses bras accoudés contre ses genoux, Kaëran essayait de chasser ce brouillard qui prenait place sur son esprit comme sur sa vision. Il ne voulait pas ... il ne devait pas ... Ce n’était certainement pas en pleurant la mort de sa mère qu’il lui ferait honneur. Au contraire, il devait être fort pour elle, mais ce vide qu’il ressentait était tout simplement insupportable...
À l’intérieur, Eiriel séchait tant bien que mal ses larmes et en se retournant, elle vit Ellana, le visage pâle. Avait-elle tout vu elle aussi ? Malgré la situation, la femme souriait et alla chercher la robe que la jeune couturière avait fabriquée pour sa défunte amie. Dans une demande silencieuse, Eiriel invita Ellana à l’aider. Il fallait faire la toilette de Naël ainsi que la changer avant que son corps ne se refroidisse et se fige pour l’éternité. La robe lui allait à merveille. Le teint de la mère était mis en valeur par cette splendide couleur en rappel à la couleur de ses yeux et ses cheveux flamboyants ne faisaient que briller davantage.
‘‘ Merci ... Ellana ... cette robe est splendide et je suis certaine que Naël te remercie de là où elle se trouve maintenant ... merci ... ‘‘
Eiriel ne put retenir ses larmes plus longtemps et éclata en sanglots.
‘‘ Une année ... à souffrir le martyre et elle a toujours gardé le sourire ... Repose en paix ... mon amie ... ‘‘
Termina-t-elle dans un murmure cassé de soubresauts.
________________________________________________
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 18:26
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 20:36
Eiriel c’était retrouvé seule dans la chambre de la défunte et ne parvenait à cesser son chagrin l’envahir. Assise sur le bord du lit, elle caressait le visage de son amie qui devenait déjà bien froid. Elle semblait si paisible ainsi... Essuyant finalement ses larmes, la chaperonne alla rejoindre Kaëran qui se morigénait dehors. Celui-ci était assis sur la seule marche de pierre, juste devant la porte. Jamais il ne daigna lever les yeux vers elle. Pas une seule fois il ne parla lorsqu’elle lui demandait comment il allait, en vue de lui tirer les vers du nez. Eiriel prit donc place à ses côtés et entoura de moitié les épaules du jeune homme pour l’approcher d’elle. Ce n’est qu’à ce moment que Kaë dégagea son visage de ses mains pour regarder l’amie de sa défunte mère. Il ne pleurait pas, mais ses yeux étaient passablement brillants.
‘‘ Je vais sortir prévenir les connaissances de ta mère et aller voir le prêtre pour lui organiser des obsèques. Ne te tracasse pas, d’accord? Je me charge de tout... Essaie d’évacuer un peu. Ça ne pourra que te faire du bien. Je ne serai pas longue. ‘‘
D’un simple signe de tête, le Lieutenant approuva et la laissa partir. Inévitablement, celui-ci replongea dans ses pensées, recréant cette bulle autour de lui. Tout s’était passé si rapidement, trop même, et loin était de lui l’envie de voir sa demeure bondée de gens qui pleureraient la mort de Naël. L’homme ne voulait pas de leurs condoléances, de leur soutien, de leurs voeux de courage. Tout ce qu’il voulait était sa solitude et voir le visage serein de sa mère avant qu’elle se retrouve six pieds sous terre et à tout jamais. Mais penser ainsi était simplement égoïste envers les connaissances de sa mère alors il ferait avec dans le mutisme. Lorsqu’il rentra, la demeure se remplissait tranquillement et on se rendait dans la chambre pour voir le corps inerte allongé dans le lit. Les pleurs commencèrent déjà. Kaëran les laissa faire leurs derniers au revoir et se rendit au salon où il se posta devant la cheminée, bras croisés contre son torse. Il y eut des allés et venu, des paroles et des accolades, mais sa conscience était bien loin, perdue quelque part. Les paroles dites ne se rendaient pas à ses oreilles, car elles coulaient sur un bouclier imaginaire qui faisait que rien ne l’atteignait; l’homme se refermait. Eiriel vint le rejoindre et le serra fortement contre lui puis se détacha, serrant l’une de ses mains dans les siennes pour lui donner le courage de passer par dessus cette difficile épreuve. C’est alors qu’Ellana se présenta devant eux la mine basse. Lui comme Eiriel prit un verre, délaissant le plateau d’amuse-gueule puisqu’ils avaient l’estomac noué.
‘‘ Je suis désolée, Monsieur Eira… je ne voulais pas… ‘‘ Murmura t-elle.
Kaëran posa le regard sur elle et n’eut pas le temps de dire un seul mot qu’elle s’en alla, serpentant entre les invités pour disparaître. Le restant de la soirée fut pénible pour le dernier membre de la famille Eira alors qu’on en venait sur les préparatifs des obsèques qui auraient lieu demain en avant-midi. Les invités avaient quitté bien tard, au compte-goutte, et Kaëran s’en retourna dans la chambre de sa mère, s’enfonçant dans le fauteuil qui se trouvait à côté de son lit. Ne pas l’entendre respirer et tousser lui faisait étrange. Depuis une longue année, surtout dans les derniers moments de la vie de Naël, ces bruits étaient devenus habituels. Maintenant, ils s’étaient tus à jamais et le corps de Naël pourrait enfin se reposer. Eiriel se tenait debout, à ses côtés et posa une main sur son épaule droite.
‘‘ Elle est mieux où elle est maintenant... jamais plus elle ne souffrira... ‘‘
On déposa un baiser sur sa tête puis des pas s’éloignèrent de lui, le laissant seul dans la chambre pendant un certain temps. En fait, Eiriel était allé chercher ses effets personnels chez elle. Sa maison était à deux minutes de marche alors bon... de toute manière, il était hors de question qu’elle laisse le fils de son ami se morfondre seul dans la maison pour les quelques jours à venir. Elle était même prête à gager qu’il finirait par rejoindre la taverne si elle ne le surveillait pas! Bref, une fois de retour dans la demeure des Eira, elle retourna vers Kaëran qui était adossé contre le dossier du fauteuil, regardant dehors alors que la nuit étendait son sombre manteau sur le monde. Les heures qui s’écoulèrent furent affreusement longues et paraissaient interminables. Kaëran et Eiriel ne fermèrent pas l’oeil une seule seconde. Au lever du jour, ils avaient mauvaise mine et de profondes cernes encadraient leur regard. D’un mouvement lent et machinal, le Lieutenant se leva de son fauteuil et se rendit à sa chambre chercher des vêtements puis s’enfonça dans la salle d’eau. Le feu sous la cuve brûlait depuis un petit moment déjà et le contact du liquide sur sa peau fut bénéfique pendant les premières secondes, mais bon. Il était là pour se laver et c’est ce qu’il fit avant de revêtir des habits propres. Eiriel avait fait de même et arrangea la tenue du jeune homme tout en essayant de replacer ses mèches de cheveux qui partaient dans tous les sens.
‘‘ Et puis tant pis... jamais je ne remporterai cette bataille. ‘‘
Un faible sourire se dessina sur les lèvres d’Eiriel. Un sourire que Kaëran lui rendit avec difficulté. On toqua à la porte et des hommes vêtus de noir entrèrent avec un cercueil. Le coeur lourd, l’homme de la maison les suivit et aida à déposer le corps de la défunte à l’intérieur avec une extrême précaution. Lorsqu’on referma le couvercle, le choc se fit automatiquement. Kaë tentait du mieux qu’il pouvait de contenir l’émotion, mais son oeil droit pleurait sans cesse. C’était la dernière fois qu’il la voyait...
Eiriel reniflait et pleurait à chaude larme, la fatigue d’une nuit blanche ne les ayant aucunement aidés. Ainsi, ils suivirent les hommes transportant le cercueil et quittèrent la demeure en silence pour se diriger vers la cathédrale sous le bruit sinistre des cloches. Ellana resta cependant à la maison, ne voulant les accompagner pour une raison quelconque. Les bancs étaient remplis ici et là des gens étant venu la veille et quelques nouveaux visages, mais sans plus. La cérémonie se passa donc et on se dirigea vers le cimetière pour y enterrer le corps. Kaëran se tenait au pied du trou et resta bien longtemps après qu’on eut remis la terre en place. Eiriel posa des fleurs magnifiques près de la croix et laissa le jeune homme seul. Il avait besoin de se recueillir un moment ainsi que de lui faire ses adieux.
De longues minutes s’écoulèrent avant que le Lieutenant ne ferme les yeux et laisse sortir un long et profond soupir de ses poumons. Du revers de la main, il essuyait les larmes qui coulaient de temps à autre et leva la tête vers le ciel pour prendre une grande inspiration.
‘‘ Je sais que tu es partie et que tu ne m’entends certainement pas, mais... sache que je regrette aujourd’hui de ne pas avoir passer plus de temps à tes côtés dans les dernières semaines... je suis désolé... sois heureuse là bas. ‘‘
Oui il pouvait passer pour un idiot à parler dans le vide ainsi, mais il n’avait trouvé un aucun autre moyen pour tenter d’apaiser sa conscience qui n’était toujours pas tranquille. Jamais il ne s’était senti si impuissant et en perte de contrôle de sa propre personne. Pourtant, il avait une sainte envie de hurler sa douleur, de frapper sur quelque chose pour se défouler, mais extérieurement, il restait inébranlable et calme. Deux heures s’étaient écoulées depuis qu’Eiriel était revenu à la maison. Celle-ci alimentait le feu au moment où Kaëran entra dans la maison, montant aussitôt à l’étage pour s’enfermer dans sa chambre. De toute manière, il n’avait pas faim et n’avait pas envie de converser avec personne. Pour l’instant, sa seule amie était la solitude et demain, il retournerait au palais pour reprendre ses fonctions. Il fallait bien changer le mal de place.
Tournant sans cesse dans son lit malgré la fatigue qui martelait ses paupières, Kaëran ne parvenait pas à s’endormir et passa sa nuit entière à faire des allers et retours entre sa chambre, celle de sa mère et le salon. On aurait dit une âme en peine. Au matin, ses yeux étaient rouges et il ne parvenait pas à remplir son estomac. Eiriel avait même tenté de l’empêcher de partir travailler, mais rien à faire. Ils s’étaient engueulés et le Lieutenant avait pris la porte arrière pour quitter la demeure. Eiriel soupira de découragement et ne se lança pas à sa poursuite. Qu’elle le veuille ou non, ce n’était que le commencement d’un long et difficile deuil. Au palais, Ayden fut surpris de voir son supérieur débarquer et s’empressa de le talonner alors qu’il se dirigeait vers son bureau.
‘‘ Tu devrais être chez toi, Kaëran... tu as une tête d’enterrement. ‘‘
‘‘ Rester chez moi à ruminer et me repasser en boucle la mort de ma mère? Hors de question. Autant me rendre utile que de me morfondre à la maison. ‘‘ Cracha t-il brusquement.
Ayden fronça les sourcils à l’écoute de ce ton rempli d’agressivité et quitta la pièce sans un mot. Valait mieux laisser Kaëran seul, le temps qu’il se calme. Mais rien à faire. Le Lieutenant frappa du poing dans le mur et grimaça sous la douleur. Quel idiot... ! Ses jointures étaient rougies et brûlaient affreusement à cause des éraflures. Résultat; il dut entourer sa main d’un bandage pour camoufler tout ça. Bref, la journée fut pénible et la concentration n’était pas du tout là. Le front contre son bureau, les yeux fermés, Kaëran n’entendit pas la porte s’ouvrir comme les bruits de pas qui s’approchaient de lui.
‘‘ Lieutenant Eira... ‘‘
Le jeune homme sursauta et se redressa d’un bond, saluant son supérieur qui se tenait devant lui la mine inquiète. Celui-ci garda le silence un moment, toisant son second des yeux pour ensuite dire :
‘‘ Vous devriez retourner à la maison pour quelques jours. Votre état ne vous permettra pas d’exécuter normalement votre tâche... et... je suis navré pour votre mère. Veuillez prendre congé et revenez en pleine forme quand vous vous en sentirez capable. Les temps sont calmes et les guerres dorment encore profondément. ‘‘
‘‘ Oui... Chef. ‘‘
À contrecœur, Kaëran dut suivre le Chef de l’armée qui le raccompagna jusqu’à la grande porte du palais, lui souhaitant bon courage, une main sur l’épaule. Le jeune homme le remerciant d’une voix faible et il quitta les lieux la tête basse. En cours de route, il se stoppa et regarda la taverne au loin. L’envie de lui ne manquait pas, mais... pas aujourd’hui.
Il devait rentrer à la maison et respecter la promesse qu’il avait faite à Naël la veille au matin... Celle de ne pas faire de bêtises... Mais il se demandait s’il arriverait à tenir le coup.
________________________________________________
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 21:34
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Dim 3 Fév - 23:29
________________________________________________
Chapitre 1 Ce n’est pas de ta faute
◆ ◆ ◆
Le soleil était en train d’atteindre son zénith dans ce ciel azur et dénué de nuages. Une douce brise soufflait sur Racium, caressant le visage des passants et faisant danser le feuillage des arbres. Des enfants jouaient dans la rue avec un ballon lorsque le Lieutenant passa et l’objet se retrouvait coincé dans un petit arbre. L’un deux essaya de monter, mais tomba bien rapidement sur le fessier. Il s’était fait mal et son ami ne manqua pas de voir le soldat arriver. Aussi s’empressa-t-il de lui bloquer la route et d’agripper le bas de sa cape couleur vermeille pour attirer son attention. Kaëran baissa alors les yeux sur l’enfant qui lui pointait son ami et l’arbre où se trouvait leur ballon.
‘‘ Monsieur ... nous n’arrivons pas à le faire descendre. ‘‘
‘‘ Je vais y aller. Laisse moi faire. ‘‘
Un sourire radieux illumina le regard de l’enfant alors que Kaëran prenait les devants. Les deux petits, âgé de peut-être sept années, l’observaient sans trouver le temps de cligner des yeux. L’armure les éblouissait littéralement, tout comme l’épée longue qui se trouvait au dos de l’homme, dans son fourreau, Le Lieutenant se donna un élan, s’agrippa à deux mains sur la première branche et se hissa. En équilibre sur celle-ci qui craquait légèrement sous son poids, le jeune homme pu donner un coup sur le ballon coincé entre le tronc et le branchage. L’objet sphérique tomba au sol et les enfants hurlèrent de joie, sursautant presque lorsque le soldat sauta pour rejoindre le sol dans un tintement métallique. De concert, les petits s’agrippèrent à ses jambes pour le remercier et un faible sourire se dessina sur les lèvres de Kaëran qui posa une main sur leur tête avant de quitter les lieux. Ce seul petit moment avait été suffisant pour calmer la rage et la culpabilité qui l’habitait; preuve que le seul rire d’un enfant pouvait chasser tous les problèmes.
Une fois devant sa demeure, Kaëran s’arrêta et l’observa un long moment. Ça lui faisait étrange de penser qu’une fois qu’il serait entré, il n’aurait plus droit au sourire de sa mère, ni à ses bonsoirs. Poussant un long soupir, le jeune homme effaça la distance qui le séparait de la porte et posa une main sur la poignée qu’il ouvrit lentement. Eiriel se leva aussitôt du canapé et s’en alla vers l’entrée d’un pas rapide, lui sauta littéralement au cou. Basculant vers l’arrière sous cette réaction imprévue, Kaëran se retrouva dos contre le mur, les mains sur les bras d’Eiriel.
‘‘ Pardonne-moi pour ce matin, Kaë ! C’est la fatigue ... je ... nous avons tous les deux les nerfs à vif... ‘‘
‘‘ Je ne t’en veux pas Eiriel ... de toute façon, mon supérieur est de ton avis alors je n’ai pas vraiment le choix de rester à la maison ... ‘‘
Eiriel semblait quelque peu rassurée de l’entendre dire ça, même si cette décision ne semblait guère être appréciée par le jeune homme. M’enfin ..., c’était ça ou risquer sa voie professionnelle pour une erreur de jugement. Kaë monta donc à l’étage pour se départir de son armure qu’il installa sur le mannequin prévu à cet effet et redescendit pour s’assoir sur le canapé. Bien entendu, il avait passé devant la chambre de sa mère qui était fermée. Eiriel prit place à ses côtés et agrippa l’une de ses mains histoire de lui remonter un peu le moral. C’est alors qu’Ellana apporta une assiette fumante qu’elle déposa délicatement sur la petite table de bois juste devant lui. Fronçant les sourcils le Lieutenant la regarda un moment, mais ne broncha pas.
‘‘ Mange, Kaé. Elle n’aurait pas voulu que tu te laisses dépérir. ‘‘
Les yeux bleutés, dont l’un tacheté d’un vert vif, se posèrent sur Eiriel qui se voulait insistante. Et puis, elle n’avait pas tort. Si Naël l’avait vu dans cet état lamentable, elle lui aurait tout fait avaler de force. Se résignant au bout de plusieurs tentatives, Kaëran empoigna la fourchette et picora dans son assiette, mangea moins que la moitié de ce qui s'y trouvait parce que la nourriture lui roulait dans la bouche. Pas que c’était mauvais, mais tout simplement parce qu’il n’avait pas faim. Sa gorge et son estomac étaient noués et ils ne réclamaient rien. Au moins, le soldat aurait quelque chose à digérer ! Eiriel était déjà contente de voir ça, car après tout, c’était un bon début et en sortant du palais, il n’avait pas foncé directement à la taverne, contre toute attente. Dans le pire des cas, elle serait allée le chercher par la peau des fesses !
Midi passa et Kaëran avait changé de place, s’installant dans le fauteuil. La tête accotée contre le dossier et légèrement penchée vers l’arrière, il essayait de se reposer les yeux, car ceux-ci picotaient depuis la veille. Eiriel avait quitté pour quelques heures, histoire d’aller faire quelques courses et laissa donc les deux jeunes adultes à la maison. C’est alors que le jeune homme sentit une présence devant lui. Ouvrant les paupières, il vit Ellana, plantée là, droite comme un piquet devant lui. Son visage était caché par sa longue chevelure. À sa plus grande surprise, elle prononça une série de mots. Depuis combien de temps n’avait-elle pas parlé ou très peu ? Cinq jours ?
‘‘ Je suis…désolée…Monsieur Eira. Je ne voulais pas…tuer Madame Eira. Je me ferais pardonner…et Monsieur Eira peut déverser sa peine sur moi. Monsieur Eira peut tout faire sur moi. N’ayez pas peur, Monsieur Eira. ‘‘
Avant qu’il ne puisse réagir, la jeune femme s’était éloignée. Dans l’incompréhension, le Lieutenant se répéta la phrase en boucle dans son esprit et tourna vivement les yeux dans la direction qu’avait empruntée Ellana. Tout ce qu’il put entendre fut le bruit d’une porte qui se refermait. Elle s’excusait d’avoir tué sa mère ? Mais elle n’avait absolument rien fait ! Naël était sous l’emprise de cette maladie depuis longtemps et le jour de sa mort était inévitable. Tout le monde le savait ça. Alors, pourquoi Ellana portait le blâme de la mort de sa mère sur le dos ? De plus, elle avait ajouté qu’il pouvait déverser sa peine sur elle ... la frapper ? Hors de question. Mais où est-ce qu’elle allait chercher tout ça ? Perdu dans son questionnement, Kaëran ne perçut pas la présence de la jeune couturière et sursauta légèrement lorsqu’il sentit une main prendre la sienne. Le bandage qui l’entourait fut déroulé et posé sur le coin de la table où se trouvait le nécessaire de soin. Qu’est-ce que... ? Tournant la tête, il vit Ellana, agenouillée à même le sol à côté du fauteuil où il siégeait.
‘‘ Je…dois soigner… votre main… Monsieur Eira… ‘‘
Ses membres tremblaient, comme toujours, alors qu’elle observait distraitement les éraflures rougeâtres de ses jointures. Un liquide désinfectant fut déposé sur une petite serviette et la jeune femme épongea pour éviter une infection quelconque. L’effet de brûlure fit grimacer Kaëran qui fronça aussi légèrement les sourcils. Mais elle n’avait pas besoin de faire ça ! Il aurait très bien pu le faire lui-même un peu plus tard dans la journée. Sauf que maintenant, il était trop tard et c’était fait. Le tout fut ramassé et la jeune femme disparut à l’étage pour la seconde fois. Ce coup-ci, Kaëran la suivit jusqu’à la salle d’eau où elle rangeait le nécessaire de soin dans une armoire en hauteur. Inévitablement, elle devait lever les bras et les manches de sa chemise descendirent pour dévoiler la peau meurtrie de ses bras. Le Lieutenant ne manqua pas de les apercevoir; rouge sur une peau si pâle ... S’approchant, il lui agrippant le poignet et tira davantage sur le tissu pour découvrir les blessures. Il s’agissait là de griffures assez fraîches, car rien n’avait cicatrisé encore. Prise sur le fait, Ellana avait baissé la tête alors que le regard vairon du jeune homme se posait sur son visage.
‘‘ Assieds-toi et relève l’autre manche. ‘‘ Dit-il d’un ton neutre, sortant de nouveau ce qu’il fallait pour soigner les bras d’Ellana.
Cette fois, ce fut à son tour de s’agenouiller devant elle et de désinfecter les plaies qui parcouraient la peau pâle de la jeune femme. Il l’entendait gémir et donc, soufflait à la surface de sa peau pâle pour atténuer les sensations de brûlure.
‘‘ Maintenant, tu vas m’écouter ... ‘‘ Commença t-il, épongeant toujours les blessures délicatement, sans la regarder. ‘‘ Ma mère était malade depuis longtemps. Je savais qu’elle allait mourir et tu n’es en rien responsable de ce qui la rongeait. Elle est morte d’une maladie qu’elle avait depuis longtemps. Alors, enlève-moi ces idées de ta tête. ‘‘
Posant la serviette humide sur sa cuisse gauche, Kaëran prit les bandages et commença à entourer l’avant-bras droit d’Ellana en prenant soin qu’ils ne soient pas trop serré. Ce fut ensuite le tour de son bras gauche et le liquide désinfectant y fut de nouveau appliqué. Encore une fois, le Lieutenant souffla sur la peau et continua, car il en avait encore à dire.
‘‘ Je t’ai déjà dit que je ne te frapperai pas et ne te ferai point de mal. Je ne suis pas ce genre de personne, frustré ou non... Ensuite, cesse de m’appeler monsieur Eira, car ça me fait dresser les cheveux sur la tête ! Je déteste et ça me donne envie de mordre les poignées de porte ! Pareil pour Monsieur Kaé. Kaé ou Kaëran, un point c’est tout, rien de plus ou de moins, sinon je vais faire un malaise... ‘‘
La serviette tomba sur le sol alors que Kaë entourait le deuxième avant-bras d’Ellana de bandages. Les soins faits, il se leva, rangea le tout et revint prendre sa place initiale devant la jeune femme qui semblait choquée ou dépassée par les évènements. Elle tremblait et avait toujours la mine basse... donc l’index sous le menton, le soldat lui redressa la tête pour croiser son regard vairon inondé de larmes qui ne voulaient pas couler.
‘‘ Tu gardes ces bandages jusqu’à ce que les plaies guérissent et je ne veux plus que tu te mutiles de la sorte. Il faut que ça guérisse et puis... j’ai fait la promesse à ma mère de prendre soin de toi, alors je le ferai. ‘‘ Dit-il, essuyant la première larme qui traçait son chemin sur une des joues de la couturière. ‘‘ Je te le redis encore une fois... tu es chez toi ici; tu es en droit de parler avec nous, de t’installer à table pour les repas et tu n’es pas une esclave. Nous pouvons très bien nous occuper des tâches ménagères aussi. Je ne sais pas ce que ton père t’a dit il y a quelques jours quand tu as fait la commission d’Eiriel, mais il ne faut pas que tu l’écoutes. Je suis là pour t’aider, Ellana. Tu as ma parole ... et je ne le laisserai plus te faire de mal. ‘‘
Sur ces dernières paroles, Kaëran lui fit un faible sourire en coin et dégagea le menton d'Ellana de son doigt.
Ellana avait baissé la tête et balbutiait en disant ces paroles. Il la surveillait ? Mais il n’y avait personne dehors aux alentours de la demeure et encore moins à l’intérieur. Comment pouvait-il la surveiller depuis le deuxième étage ? Ses tremblements se faisaient de plus en plus violents alors que les larmes commençaient à couler par elles seules sur les joues pâles de la jeune femme. La respiration de celle-ci se faisait aussi haletante, comme si elle cherchait son souffle cause d’un manque d’air. La pauvre semblait complètement perdue. Pourtant, ce qu’il lui disait était sincère et maintenant il comprenait que le père de la jeune couturière n’avait certainement pas été doux à son égard dans sa jeunesse, attendant d'elle discrétion et obéissance. Cependant, Ellana réussit à se calmer suffisamment après quelques longues minutes pour dire entre quelques hoquets:
‘‘ Je…dois r-respecter l-les règles…je n’ai p-pas le droit…je ne p-peux pas… ‘‘
Respecter les règles ? Ellana était donc atteinte ... à ce point ? Kaëran n’en croyait pas ses oreilles et ne put dire quoi que ce soit, car la jeune femme fuyait la salle d’eau en pleur. Il entendit le bruit de ses pas dans le couloir puis la porte de la chambre d’ami se refermer. Se redressant sur ses jambes à son tour, le Lieutenant sortit et approcha de la pièce où elle logeait, posant une main sur la poignée de la porte qu’il tourna pour ouvrir. Il ne pouvait tout de même pas se permettre de laisser son invitée en proie à une crise de panique et au risque qu’elle se mutile davantage. Lorsque ses yeux la trouvèrent dans l’obscurité de la pièce, car les rideaux étaient fermés, Kaë s’empressa de se rendre à ses côtés et posa un genou au sol.
‘‘ Ellana, calme-toi... ça va... chhhht...‘‘
Il voyait bien qu’elle avait essayé d’enlever ses bandages, mais n’en fit pas de cas. Pour l’heure, la jeune femme devait essayer de se calmer tant bien que mal. Sauf qu’elle était dans un état de détresse psychologique et semblait perdue entre les dires de son père et les siens. S’approchant encore un peu d’elle, Kaëran se risqua à la prendre dans ses bras et la serra doucement contre lui. Sur le coup, Ellana ne semblait pas comment réagir face à ce geste, et il la sentit se raidir. Les tremblements se firent un peu plus violents eux aussi. Posant une main sur sa tête, le Lieutenant l’accota contre son torse et caressa délicatement sa chevelure.
‘‘ Respire et calme-toi. Je suis là pour veiller sur toi alors n’aies pas peur ... ton père ne viendra pas ici et quand bien même il oserait, je sais me défendre. Je ne crois pas qu’il soit assez fou pour le faire alors que je suis présent. ‘‘
Stark devait être assez intelligent pour savoir quand agir tout de même. S’il osait faire du mal à sa fille en présence du soldat, ce serait automatiquement le cachot. De toute manière, à partir de maintenant, Ellana ne devait plus être seule dans la demeure. Alors quand, Kaëran serait absent, car oui il reprendrait ses responsabilités au palais un jour où l’autre, Eiriel serait là pour prendre soin d’elle. Dans ses bras, la jeune couturière finit par se calmer et ses respirations se faisaient un peu plus régulières. L’homme ne la libéra pas avant qu’elle ne retrouve un état normal puis il releva son visage, essuyant ses joues.
‘‘ Un regard aussi beau ne devrait pas être aussi triste... C’est ce que t’aurais dit ma mère si elle avait été là... ‘‘
Kaëran baissa légèrement la tête, sont esprit ailleurs l’espace de quelques secondes puis il sera de nouveau la jeune femme contre lui. Ça pouvait paraître stupide, mais... cette seule présence, aussi étrangère soit elle, lui faisait un bien monstre. Cela lui évitait de se morfondre seul dans son coin ou de succomber à la tentation de se brouiller la cervelle à la taverne. Parce que ce n’était pas l’envie qui lui manquait. Et puis, il se devait de respecter la promesse qu’il avait faite à Naël avait qu’elle ne pousse son dernier souffle et le quitte. C’était, sa dernière volonté a proprement dit.
‘‘ Tu n’es pas chez ton père ici. Tu n’as pas à respecter les règles qu’il t’a inculquées. Tu n’es plus enchaîné à ses pieds. Tu es ailleurs et sous ce toit, tu es aussi libre que l’air. ‘‘ Murmura t-il, la voix quelques peu cassée. ‘‘ Sois forte. Écoute l’autre petite voix que tu étouffes sans cesse et recommence à zéro. Et si tu as besoin de soutien, d’aide et de conseils, je suis là. Eiriel aussi. Tu n’es pas seule et tu n’es pas un monstre ... je te l’assure, Ellana. ‘‘
Spoiler:
[HRP: Court, mais vu la situation ... peu pas faire mieux =3]
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Mar 5 Fév - 2:29
________________________________________________
Chapitre 1 Une feinte pour dormir
◆ ◆ ◆
Lentement, les tremblements d’Ellana faiblissaient, mais ils étaient toujours bien présents. Tout comme la peur que cette jeune personne dégageait d’ailleurs. Avait-elle toujours vécu ainsi ? Il espérait que ce ne soit pas le cas, mais savait au fond de lui que ça l’était. Pour qu’une personne soit si solidement accrochée à ses valeurs, c’étaient qu’elle y avait été habituée et élevée ainsi. Or, Ellana avait grandi comme une martyre à coups de règles et de violence. Il ne fallait pas être stupide pour s’en rendre compte, quand même. C’est alors qu’il y eut du mouvement dans les bras du Lieutenant qui sortirent du brouillard pour baisser les yeux vers la couturière. Celle-ci avait levé son regard vers lui, par elle-même, le regardant dans le blanc des yeux pour la première fois.
‘‘ Merci…Mon…Kaëran. ‘‘
Par ce seul murmure, Kaëran avait compris qu’elle allait mieux et que sa crise était maintenant de l’histoire ancienne. Ses yeux avaient cessé d’exprimer leur tristesse et ses joues séchaient après qu’il eut essuyé ses dernières larmes. Un faible sourire en coin se dessina sur ses lèvres puis il haussa les épaules. Ce n’était rien ... absolument rien. Ellana avait tout simplement besoin d’aide et si elle s’était retrouvée sous le toit de la famille Eira, ce n’était certainement pas dû au fruit du hasard. Il y avait une raison à sa présence que le jeune homme ne pouvait expliquer. Peut-être ne croyait-il pas audit hasard ? Il y avait de fortes probabilités.
‘‘ Je…je vais…essayer de…d’y arriver… ‘‘
Elle y arrivera, il en était certain, mais pour cela il fallait qu’elle s’en donne la peine et qu’elle y aille à son rythme. Si elle se forçait, les résultats ne seraient pas les mêmes. Et par la même occasion, Ellana allait enfin se découvrir une personnalité qui lui était propre et pourrait sourire à la vie. Cependant, le père d’Ellana devait être surveiller afin qu’il n’attente rien contre elle. Il avait voulu se débarrasser d’elle, mais ne supportait pas qu’elle s’adapte à un autre style de vie ? C’était tout simplement ridicule. Pour l’heure, il devait s’occuper d’elle et remonter la pente suite au décès de sa mère alors chaque chose en son temps. Les deux jeunes gens se détachèrent alors et Kaëran se redressa, Ellana l’imitant par la suite en disant :
‘‘ Je… vais vous préparer un repas, mon…’’
Les sourcils du concerné se froncèrent légèrement alors qu’il attendait le mot qui lui ferait dresser les cheveux sur la tête et provoquerait la chair de poule à la surface de sa peau. Mais la jeune couturière se reprit bien rapidement et soupira, s’excusant du regard. Cela amusant l’homme qui avait croisé les bras sur son torse.
‘‘Pardon. Kaëran. ‘‘
‘‘ Ça va. ‘‘ Dit-il. ‘‘ Tu y es arrivé. C’est l’important. ‘‘
Sur ce petit mot d’encouragement, le Lieutenant prit les devants et ils quittèrent la chambre d’ami pour marcher un court moment dans le couloir qui était décoré de quelques tapisseries, sans plus. Certes, les Eira vivaient passablement bien, mais ils n’exhibaient pas leur richesse, car il connaissait sa valeur. Autant s’en servir pour les bonnes choses. Leur pas résonnaient faiblement, en écho sur les murs et ils parcoururent l’escalier qui menait vers le rez-de-chaussée, et donc vers la cuisine. De toute manière, le temps s’écoulait et Eiriel serait bientôt de retour avec les quelques commissions qu’elle avait dû faire dans la journée. Partie dans sa lancée, Ellana était en train de tout sortir et s’apprêtait à tout faire, prenant le couteau qu’allait empoigner le soldat pour s’occuper des légumes. Kaëran mit la main dans les airs, paume vers le haut et attendait qu’elle veuille bien lui donner l’ustensile, ce qu’elle fit en s’excusant du regard pour une seconde fois. Elle avait longuement hésité, tentant de lui voler sa tâche, mais il restait là et ne bronchait pas, la bloquant de son dos lorsqu’elle essayait de s’approcher. Après un moment, elle se résigna et comprit, puis le laissa tranquille. Alors, Kaë put continuer de couper les légumes en paix alors que la jeune femme s’occupait de la viande et de sa cuisson. C’est alors qu’elle se tourna vers lui et l’observa. Sentant un regard posé sur lui, il tourna la tête et vit la nervosité sur son visage.
‘‘ Mon…ohh…Kaëran, qu’est-ce que c’est…une…esclave ? ‘‘
Aussitôt après, Ellana retourna à sa tâche et Kaëran fit de même. Il fallait tout de même qu’il regarde ce qu’il faisait pour éviter de se couper un doigt. Disons que le sang ne faisait pas un très bon assaisonnement... hormis pour les vampires. Mais passons !
‘‘ C’est une personne qui obéit au doigt et à l’oeil à son maître ou sa maîtresse. L’esclave exécute toute les tâches qu’on lui ordonne de faire sans tenter de rétorquer au risque d’être sévèrement puni. Il n’a droit à aucun privilège et encore moins au confort ... On le qualifie souvent de bon à rien et d’être inférieur qui n’a pas droit à la liberté. Il est un peu comme un animal et facilement remplaçable, car il n’est pas indispensable. ‘‘
Kaëran poussait avec la lame du couteau les cubes du premier légume qu’il avait coupé puis attaqua les carottes qu’il trancha en fine lamelle avant tout. Du coin de l’oeil, sans pour autant tourner la tête, l’homme remarqua qu’Ellana semblait réfléchir à la réponse qu’elle avait eue. Pour la ramener sur terre, il lui mit un bout de carotte dans l’oreille et fit comme s’il s’était rendu là par magie. Kaë garda donc les yeux sur la planche à coupée et fut trahi par Eiriel qui était rentrée et qui le pointait du doigt en silence. Les sacs furent posés sur la table et l’homme de la maison sursauta lorsque sa chaperonne hurla son nom, lui sautant dans le dos.
‘‘ KAË ! ‘‘
‘‘ Bon Dieu de merde ! Tu veux me faire mourir à mon tour ?! ‘‘ S’exclama-t-il en posant le couteau sur le plateau avant de blesser quelqu’un par mégarde.
‘‘ Ce serait un beau gâchis! Et ... Soit poli devant les dames, jeune homme. Les gros mots ne sont pas permis quand je suis ici. L’aurais-tu oublié ? ‘‘
‘‘ Hum ... oui ... pardon. ‘‘
Le Lieutenant, habituellement un personnage de haute importance dans la hiérarchie militaire, semblait bien petit face à cette paysanne de Racium qui faisait facilement deux têtes de moins que lui. Embêté, Kaëran se frottait la nuque d’une main puis termina sa tâche avant de monter la table. De toute manière, Ellana s’occupait toujours de la viande et de la cuisson des pommes de terre. Eiriel sortit alors du vin d’un sac de cuir et posa la bouteille devant la place du jeune homme qui se figea en la regardant. Un sourire mesquin se dessina sur les lèvres de la femme.
‘‘ J’avais envie de boire un peu de ce succulent vin ! Monsieur Grapp (xD) m’a fait un bon prix je dois l’avouer. Ça t’évitera d’aller à la taverne le soir. Ah ! Et je pourrai aussi te surveiller d’un peu plus près... ‘‘
‘‘ Cesse de te moquer de moi, Eiriel ! ‘‘
‘‘ Je ne me moque pas de toi, je me moque avec toi ! Nuance ! ‘‘
‘‘ Tu ... m’énerves! ‘‘
‘‘ Moi aussi je t’adore, mon chéri. ‘‘
Et voilà, l’homme se mit à maugréer alors qu’il terminait de placer couteaux et fourchettes à côté de chacun des couverts. Eiriel elle, ricanait et lui claqua le dos gentiment avant d’aller aider Ellana à monter les assiettes. Ils s’installèrent donc à table et la paysanne était d’humeur bien taquine ce soir-là et avoua avoir payé avec l’argent du Lieutenant qui trainait sur la table du salon. Pour la peine, Kaëran prit la bouteille et but le reste d’un coup sous le regard ébahi d’Eiriel qui éclata de rire lorsqu’il la déposa devant elle, vide.
‘‘ Tu vas t’endormir dans le fauteuil. ‘‘
‘‘ Je vais dormir dans mon lit. Ce n’est pas ça qui va m’assommer! J’ai l’habitude maintenant ... ‘‘
Mais il avait parlé trop vite. Car il s’était effectivement retrouvé dans son fauteuil, bien adossé et avait la tête accotée contre le dossier; il avait les yeux fermés et dormait comme un loir. Eiriel avait pris une couverture et l’avait posé sur lui doucement, embrassant son front comme une mère puis vint retrouver Ellana. Elles s’occupèrent de tout nettoyer et ranger.
‘‘ Il n’avait pas dormi depuis deux jours ... c’est le seul moyen que j’ai trouvé pour qu’il prenne un peu de sommeil. Comme sa mère, l’alcool l’assomme, surtout bu trop rapidement ! ‘‘
Décidément, Eiriel était fière de son coup et ne le cacha pas, car un large sourire illuminait son visage rond. Une fois la cuisine rutilante, la jeune couturière furent poussées vers la salle d’eau de force afin qu’elle aille prendre un bon bain chaud et elles filèrent dans leur chambre respective pour la nuit.
Kaëran n’avait pas bougé de son fauteuil et ce fut ainsi jusqu’au lendemain matin ...
Spoiler:
[HRP: Je te laisse le loisir de faire le truc du jardin et du roman de questions avant que je ne l’oublie :3 Et ... j’ai inventé un nouveau mot hier soir : ‘‘ Prévilgences ‘‘ au lieu de privilèges xD]
________________________________________________
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Mar 5 Fév - 19:58
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Mer 6 Fév - 2:00
________________________________________________
Chapitre 1 Un nouveau monde
◆ ◆ ◆
Dehors, le soleil amorçait son ascension dans le ciel et était partiellement camouflé par les nuages qui passaient, par-ci par-là. Une brise douce et fraîche soufflait sur la ville qui était bien vivante malgré l’heure. Quelques oiseaux se chamaillaient dans les rues pour des restants de nourriture et fuyaient dès qu’un enfant tentait de s’approcher pour les attraper. Ça finissait en crise de larmes et les parents tentaient de le réconforter, mais rien à faire. Chez d’autres gens, on dormait ou on commençait tout juste à émerger d’un sommeil profond et réparateur. C’était justement le cas d’un certain monsieur Eira.
Ls bruits autour de lui n’avait fait qu’activer son processus de réveil, car il aurait certainement dormi dans son fauteuil quelques heures supplémentaires. Il fallait s’en dire que le sommeil n’avait pas été chose courante chez lui depuis la mort de Naël qui était toujours fraîche dans l’esprit des résidents de la demeure. Kaëran grommelait faiblement, plissant le nez lorsqu’il entendit le bruit des assiettes se déposer sur la table de bois. Mais il y avait autre chose de bien plus intéressant pour ses sens; l’odeur d’un petit déjeuner qui flottait dans l’air. Lentement, mais sûrement, le Lieutenant ouvrit les paupières. En position assise, il étira les jambes puis se leva pour continuer avec le reste de son corps pendant que son regard vairon se posait sur ce qui l’entourait. Une main se porta à sa nuque et la massa en guise d’embrassement. Que faisait-il dans le salon ? Ah ... oui ... c’est ça. En faisant un retour dans ses souvenirs, Kaëran se souvint avoir bu le restant de la bouteille de vin d’un coup alors qu’elle était pleine au ¾. Eiriel lui avait fait un sale coup et ses doutes se confirmèrent lorsque son regard se planta sur elle qui avait un large sourire aux lèvres. En plus, elle osait rire ?!
‘‘ Bien dormi ? Je t’avais dit que tu t’endormirais dans le fauteuil ! ‘‘
‘‘ Tu m’as fait un sale coup encore une fois ! ‘‘
N’ayant pas à se justifier, Eiriel invita le jeune homme à les rejoindre autour de la table une fois le repas servi; des oeufs frais, des pommes de terre cuites et séchées sur le feu accompagné de pain maison tout neuf. Kaëran mangea avec appétit cette fois, vidant carrément son assiette avant les deux femmes. Eiriel, un peu comme la nounou du fils de son amie, avait levé ses yeux argenté vers Kaë et lui dit :
‘‘ Eh bien dis donc, mais c’est que tu as meilleure mine mon grand. Le vin à des effets bénéfiques je crois. Fais-moi penser d’aller en chercher une autre ce soir et cette fois, tu la boiras au lit. ‘‘
‘‘ Tu veux que je devienne dépendant ou quoi ? Je n’ai pas besoin de ça pour dormir ... enfin ... ça a aidé hier. M’enfin ... ‘‘
‘‘ Je peux te frapper avec une buche de bois si tu préfères. Juste derrière la tête. Mais je ne garantis pas que le plancher te sera confortable. ‘‘
Ce fut ainsi jusqu’à ce qu’Eiriel et Ellana eussent terminé de manger elles aussi, Kaëran se chargeant de prendre leurs couverts et de les porter jusqu’à la bassine où le tout serait nettoyé. De toute manière, le Lieutenant ne pourrait reprendre son poste qu’une fois qu’il se serait remis un tant soit peu de la mort de sa mère qui était, pour l’heure, encore trop récente. Car même s’il tentait de le camoufler à la vue de ses congénères, un immense vide le traversait de part et d'autre. C’était difficile à supporter même si la présence d’Eiriel et d’Ellana lui permettait d’oublier un peu et de penser à autre chose. Quelque chose de plus joyeux. S’il aurait été seul, comment cela ce serait-il passé ? Il n’en savait rien, mais n’aurait peut-être pas tenu le coup comme il le faisait maintenant. Mieux valait ne pas y penser et de garder la tête haute. Il allait remonter la pente, peu importe ce que cela allait lui en coûter. Mais il le ferait, car il ne pouvait briser cette promesse qu’il avait faite. C’est alors qu’Eiriel décida de leur fausser compagnie pour le restant de la matinée histoire d’aller voir comment ça se passait chez elle. Son époux ne la voyait pas souvent et il fallait bien qu’elle aille lui rendre visite de temps à autre, non ? Kaëran quant à lui, voulut aider Ellana à tout nettoyer, mais celle-ci lui fit comprendre qu’elle se débrouillerait seule sans problème. Bien qu’il eut insisté, il ne réussit pas à la faire changer d’avis et monta à l’étage pour prendre des vêtements propres et fila dans la salle d’eau pour se nettoyer. L’eau sur sa peau ne put qu’apporter réconfort et bien-être. Bon sang que ça pouvait faire du bien de si bon matin après une nuit à dormir sur un fauteuil ! Ledit fauteuil assez peu confortable d’ailleurs. Une vingtaine de minutes plus tard, Kaëran revint au rez-de-chaussée, roulant les manches de sa chemise jusqu’aux coudes, puis fit signe de tête à Ellana pour qu’elle le suive.
Au départ, celle-ci fut hésitante, mais suivit le Lieutenant qui avait envie de prendre l’air dans la cour arrière. Ainsi, ils seraient tranquilles et pourraient en profiter pour s’aérer l’esprit. Ellana restait en retrait, incertaine, et il attendait que ses pieds eussent touché la seule marche de pierre qui menait vers l’herbe qui recouvrait le lieu. La porte fut donc refermée derrière elle puis l’homme la laissa découvrir l’endroit à sa guise et à son rythme.
Kaëran laissa Ellana s’avancer légèrement, voyant clairement un sourire se dessiner sur son visage. Ses yeux brillaient d’émerveillement comme si tout ce qu’elle voyait ici et maintenant lui était complètement inconnu. Comment cela pouvait être possible ? N’avait-elle jamais mis les pieds dehors, hormis la fois où il était venu la chercher et pour aller à la rivière en après-midi ? Mais le sourire que la jeune couturière fit était contagieux, car le Lieutenant se surprit à en faire de même. Cette femme était remplie d’innocence et d’une curiosité insatiable. Ça se voyait dans son regard vairon. C’est alors qu’elle s’avança dans le jardin, regardant tout ce qui l’entourait. Plus particulièrement sur la fontaine qui se trouvait au centre et qui se constituait de pierre où on avait sculpté un oiseau; l’animal préféré de Naël. Pour elle, s'était un signe de liberté.
‘‘ Qu’est-ce que c’est ? Pourquoi l’oiseau crache-t-il de l’eau ? D’où elle vient l’eau ? Pourquoi ça ne déborde pas ? Et ça sert à quoi ? ‘‘
‘‘ Eh b- ... ‘‘
Cinq questions défilées l’une à la suite de l’autre et jamais il n’eut le temps de répondre. Ellana s’était déjà précipitée vers la serre où Naël avait pour habitude de cultiver ses propres légumes. Depuis qu’elle était malade, c’était Eiriel qui s’en occupait, venant en récolter de temps à autre pour en apporter chez elle. Kaëran vint la rejoindre et il fut une nouvelle fois bombardée de questions
‘‘ Il y a marqué quoi ? Ça veut dire quoi ? Et pourquoi les plantes sont-elles enfermées ? Elles n’ont pas de pieds pour s’enfuir comme moi…Ce sont des esclaves aussi ? Je ne savais pas que c’était vivant une plante… ‘‘
Le jeune homme ne put que ricaner aux deux dernières questions d’Ellana qui avait un sens assez comique en elles-même. Encore une fois, Kaë ne put répondre et la laissa plutôt découvrir son nouvel environnement, heureux d’avoir pu rendre le sourire à cette jeune femme en cette journée. Et puis, ça amenait un peu de vie après tout. La couturière s’agenouillait par terre à tout moment, caressant l’herbe comme s’il s’agissait du pelage d’un animal quelconque. Ensuite, elle se leva pour poser de nouveau les genoux au sol et prendre une feuille d’arbre dans ses mains pâles et frêles, l’observant sous tous les angles possibles. Même les fleurs y passèrent, élargissant davantage le sourire peint sur les lèvres d’Ellana. Après un moment, Kaëran l’entraîna avec lui vers un banc situé à l’ombre sous le feuillage d’un grand et vieux saule, mais la question qu’elle lâcha ne le surprit pas.
‘‘ Pourquoi le banc est en pierre gravée ? Moi je connais que les bancs de bois… ‘‘ Dit-elle souriant toujours.
Mais son sourire s’estompa bien rapidement lorsqu’elle prit conscience de quelque chose qu’échappa au jeune homme. Sur le coup, il avait cru qu’elle se sentait coupable d’avoir profité de tout ce qu’elle avait eu l’occasion de voir, toucher et sentir. Pourtant, avoir accès à la nature n’était pas un droit privilégié, au contraire. Pour bien des gens, elle était un sanctuaire où l’ont pouvoir se recueillir et se retrouver en paix avec soi-même. Ellana avait donc baissé la tête, mais Kaë ne perdit pas son sourire en coin pour autant.
‘‘ Pardon Kaëran…je ne voulais pas vous empêcher de répondre…pardon… ‘‘
‘‘ Ce n’est pas grave, Ellana. J’ai cru comprendre que tout ça était nouveau pour toi. Mais si tu veux des réponses à tes questions, il faudrait les attendre, non ? Et puis tu peux poser toutes les questions que tu veux. J’y répondrai comme je peux vu que je ne sais pas tout ... quand même. ‘‘
Il croisa de nouveau le regard de la jeune femme qui avait relevé légèrement la tête et elle retrouva un faible sourire. Cependant, quelque chose d’autre attira leur attention; une grosse boule de poil noire et blanche qui grimpa sur les genoux du Lieutenant. Le chat se frôlait contre lui et ronronnait faiblement. Ellana parut stupéfaite de voir cette petite chose et n’osait même pas poser la main dessus.
‘‘ C’est un chat errant ... il traîne toujours dans les parages. ‘‘ Expliqua Kaëran.
La petite bête changea de genoux et vint s’assoir sur les cuisses d’Ellana, lui léchant doucement le menton de sa langue rugueuse. La grimace qu’elle lâcha fit rire Kaëran qui dut lui expliqué pourquoi sa langue n’était pas douce comme la plupart des animaux, et elle semblait de nouveau émerveillée. Un peu plus tard, les jeunes adultes retournèrent à l’intérieur sauf que leur compagnon à quatre pattes ne voulait plus se détacher de la couturière. Ils ne remarquèrent sa présence qu’une fois dans la demeure, la porte refermée. Le chat miaula et fit sursauter le soldat qui était en train de mettre une bûche dans la cheminée, un genou posé sur le plancher.
‘‘ Mais mer... ‘‘
Kaëran dut se taire au risque de sortir un gros mot et suivit la bête des yeux qui allait se frotter contre les chevilles d’Ellana, un peu plus loin.
‘‘ Tu t’es fait un copain, je crois. ‘‘
Et tant qu’à le mettre dehors, il pouvait toujours rester ici. De toute manière, il n’appartenait à personne. Une présence animale dans la maison ne ferait pas de tort au final et ça apporterait un peu plus de vie.
‘‘ Il faudra que tu lui trouves un nom. Je suis le pire des nuls dans ce domaine... ‘‘
________________________________________________
Dernière édition par Kaëran Eira le Mer 8 Mai - 3:43, édité 1 fois
Invité Invité
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran] Mer 6 Fév - 15:04
Contenu sponsorisé
Sujet: Re: Une rencontre...bouleversante...? [PV Kaëran]